Hyperlaxité et pratique de la flûte

Le jeu de la flûte traversière se fait les bras levés en abduction dans une posture asymétrique. Cette position latérale de l'instrument (à noter que de nombreuses flûtes ont été créées sur des bases ergonomiques permettant un jeu symétrique) peut être la source de tensions, contractures au niveau du membre supérieur, ainsi que du haut du dos.
Les sites anatomiques les plus souvent cités comme douloureux par les flûtistes sont l'épaule gauche, le cou, le poignet, ainsi que l'index gauche et l'auriculaire droit.

Les douleurs étaient plus fréquemment exprimées par les élèves flûtistes ou par les musiciens qui avaient une pratique irrégulière ; elles étaient quasiment absentes dans cette étude chez les professionnels.

L'échelle de Beighton est fréquemment utilisée pour mesure l'hyperlaxité, mais elle reste d'une valeur limitée pour mesurer l'hyperlaxité digitale qui est souvent retrouvée chez le musicien.

• De longues heures de pratique sans période de récupération sont un facteur de risque susceptible de causer des douleurs.
• Une pratique irrégulière peut être également un facteur de risque. La régularité de la pratique peut à l’inverse être bénéfique en favorisant l'adaptation et l'endurance, mais nécessite aussi des périodes de récupération pour permettre à l'organisme de s'adapter.
• La position asymétrique du jeu à l'instrument de la flûte traversière. Le geste à l'instrument, la position des doigts en hyperextension (geste inadapté), du bras en élévation et en abduction, une flexion du rachis cervical sont contributeurs de tensions, de contractures, de douleurs, voire de tendinopathies.
• Tous les flûtistes ayant obtenu un score supérieur ou égal à 4 sur 9 sur l'échelle de Beighton se plaignent d'inconfort et de douleurs musculo-squelettiques lors du jeu, c’est-à-dire les flûtistes qui ont une hyperlaxité.

L'étude confirme que :

• Les articulations digitales des flûtistes sont plus laxes que celles de la population générale. Les flûtistes ont une plus grande amplitude des mouvements des doigts, probablement en raison des longues heures de pratique et des mouvements répétitifs.
• Les flûtistes ont des articulations des doigts hyperlaxes mais n'ont pas plus d'hypermobilité généralisée que la population générale.
• Les flûtistes, même ceux qui ont des articulations hyperlaxes, n'ont pas une proprioception altérée, elle s'avère particulièrement fine (supérieure à celle des témoins).

Il est donc clair que le nombre d'années de formation et le temps de pratique améliorent la proprioception ainsi que la mobilité articulaire digitale.

Eveiller la conscience corporelle du musicien

Il est à noter que le fait d'avoir une proprioception fine n'est pas toujours synonyme de conscience corporelle. La conscience corporelle est un aspect clé de la formation des flûtistes. Les enseignants doivent maîtriser les outils méthodologiques et disposer de temps dans leur classe pour améliorer la conscience corporelle en dehors et durant la pratique instrumentale car la conscience corporelle est un bon prédicteur d'une bonne posture, d'efficacité corporelle et d'excellence sur le plan musical. L'amélioration de cette conscience corporelle est un des moyens pertinents pour prévenir les lésions liées à la performance musicale. Renforcer la stabilisation des articulations digitales, développer un geste respectueux de la physiologie articulaire à l'instrument en respectant les différentes arches longitudinales et transversales de la main permettraient tout à la fois d'améliorer le confort et la performance du musicien à l'instrument.

L’échantillon sur lequel a porté cette étude est relativement faible, 28 flûtistes. Et si l’on retrouve conformément aux publications sur ce thème plus de flûtistes de sexe féminin hyperlaxes que de flûtistes de genre masculin, il serait nécessaire pour une plus grande validité de ces résultats de réaliser une étude avec un échantillon plus important et plus équilibré selon le genre.

Rédacteur Docteur A. Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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Isabel Artigues-Cano, Howard A. Bird. Hypermobility and Proprioception in the Finger Joints of Flautists. J Clin Rheumatol. 2014;20(4):203-208.

[1] Ferrell WR, Mallik AK, McDonald AG, et al. Impaired proprioceptive acuity at the proximal interphalangeal joint in patients with the hypermobility syndrome. Rheumatology. 1994;33:631–637