Art de la Gravure

Gravure à l’eau-forte

On prend une plaque de cuivre qu’on chauffe légèrement, afin de la recouvrir d’un vernis enfermé dans un petit morceau de soie, de taffetas noir. On égalise ce vernis en tamponnant avec un large tampon formé d’une boule de coton entourée de soie. Quand le vernis est parfaitement étalé, on enfume la planche à l’aide d’une chandelle au-dessus de laquelle on promène cette planche. Quand celle-ci est refroidie, on porte le décalque fait sur papier-glace comme nous l’avons écrit ci-dessus.

Nous devons dire que beaucoup d’artistes dessinent d’un premier coup sur la planche préparée, sans faire de décalque. L’artiste entame le vernis et mord légèrement son cuivre. Tout le travail terminé, il borde sa planche avec la cire jaune, de poix de Bourgogne et de suif. Ceci fait, l’artiste verse sur la planche de l’acide acétique étendu d’eau pour décaper, pour ainsi dire, les tailles et préparer la morsure. Après avoir laissé de cinq à six minutes agir l’acide acétique, il remplace celui-ci par un bain d’acide nitrique étendu d’eau (eau-forte). Plus l’acide séjourne sur la planche, plus les traits (tailles) se gravent profondément ; aussi les artistes profitent-ils de ces résultats pour obtenir de grands noirs. Quand les tailles sont très rapprochées, ils obtiennent par des crevés des noirs pleins. On nomme crevés ces noirs, parce que l’acide, qui mord fortement sur les traits, ronge à tel point leurs bords que le filet de vernis séparant deux traits crève et les deux filets se confondent, bien qu’au tirage un ton plus pâle les sépare. Quand l’acide mord la planche, il se forme sur les traits de petites bulles qu’on nomme bouillons. Le graveur, avec un pinceau souple, passe sur les traits pour supprimer les bouillons, qui auraient l’inconvénient d’empêcher une morsure uniforme. Quand la planche est bien mordue, ce qui se voit au brillant et à la profondeur des tailles, on retire l’acide ; puis on nettoie la planche en l’essuyant avec un chiffon de laine imbibé de pétrole ou d’essence de térébenthine. Dans cet état la planche peut fournir des épreuves, dites du premier état, sur lesquelles l’artiste se rend compte du résultat de son travail. S’il n’en est pas satisfait, il revernit, mais sans enfumer la planche, afin que, le vernis restant transparent, il puisse repasser (rentrer) sur les traits et faire mordre une seconde fois et partiellement la planche, qui, tirée après son nettoyage, fournit des épreuves de second, troisième, quatrième et cinquième état, suivant que l’artiste a retouché deux, trois, quatre ou cinq fois sa planche. Nous venons de voir le moyen d’accentuer les traits ; mais il arrive aussi bien souvent que dans une première morsure certaines parties sont trop accusées. Rien n’est plus facile que de les éteindre ; on se sert pour cela d’un brunissoir, outil dont la section est ovale et avec lequel on plane légèrement le métal. Enfin, si un artiste veut obtenir des tailles fines et brillantes, il travaille sur le tout avec la pointe sèche. Quand celle-ci fournit sur le métal des barbes, c’est-à-dire des sortes de petits copeaux adhérents à la taille, on les supprime avec l’ébarboir, outil triangulaire qui taille sur chacun de ses trois bords. Beaucoup d’artistes, voulant obtenir de puissants effets, font à dessein des barbes qui retiennent de l’encre en quantité lors du tirage, ce qui donne des noirs intenses aux estampes.

L’épreuve tirée dans ces conditions est dite tirée à toutes barbes et se vend fort cher dans les ventes ; car ces épreuves sont très rares, le tirage ne fournissant que quelques exemplaires, le rouleau de la presse ayant vite accompli le travail d’ébarbage. Nous n’insisterons pas davantage, n’ayant pas à faire ici un traité de la gravure ; nous ne dirons qu’une chose, c’est qu’il n’est pas de plaisir plus grand pour le véritable artiste que de travailler une planche à l’eau-forte ; il peut obtenir tous les effets qu’il désire, il peut retoucher une planche autant qu’il le juge utile, il peut même partiellement refaire tout un côté. Heureux ceux qui ont le loisir de cultiver ce bel art, car c’est là le véritable art d’agrément par excellence, même pour les artistes qui en font leur profession.

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