Mignon

Scéne du troisième acte

Mignon
I

Connais-tu le pays où fleurit l’oranger,
Le pays des fruits d’or et des roses vermeilles,
Où la brise est plus douce et l’oiseau plus léger,
Où dans toute saison butinent les abeilles ?
Où rayonne et sourit comme un bienfait de Dieu
Un éternel printemps, sous un ciel toujours bleu ?
Hélas ! que je ne puis-je te suivre
Vers ce rivage heureux d’où le sort m’exhila !
C’est là que je voudrais vivre,
Aimer et mourir !...C’est là !...

II
Connais-tu la maison où l’on m’attend là-bas ?
La salle aux lambris d’or où des hommes de marbre
M’appellent dans la nuit en me tendant les bras,
Et la cour où l’on danse à l’ombre d’un grand arbre ?
Et le lac transparent où glissent sur les eauxx
Mille bateaux légers pareils à des oiseaux ?...
Hélas ! que ne puis-je te suivre
Vers ce pays lointain d’où le sort m’exila !
C’est là que je voudrais vivre,
Aimer et mourir !... C’est là !...

Wilhelm
Ce pays enchanté dont tu parles, cette
contrée heureuse dont ton cœur a gardé le souvenir, n’est pas l’Italie, chère petite ?

Mignon rêveuse
L’Italie ! … je ne sais…

Wilhelm, à part
Etrange créature !
Le caractère rêveur et mélancolique de la musique et poésie du récit et des couples de Mignon ont un grand charme.
Le duo chanté par Mignon et Lotharie :
Légères hirondelles
Oiseaux bénis de Dieu,
Ouvrez, ouvrez vos ailes,
Envolez-vous ! Adieu !
Forme un épisode gracieux, dont le succès a passé de la scène dans les concerts et les salons.
La partie divertissante de ce livret a aussi son mérite, et est de telle nature, qu’elle repose l’esprit sans nuire au caractère sérieux de l’ensemble de l’action. En voici un échantillon. Le comédien Laerte raconte les infortunes de ses camarades, que le spectateur a vus partir au finale du premier acte avec armes et bagages. Surprise par l’orage à une lieue du château où elle allait jouer la comédie, la troupe s’égare dans des chemins de traverse et tombe dans un marais.

Philine
En vérité ! …

Laerte, déclamant
Oui, madame, embourbés dans une grenouillère !
Schwartz y perd sa perruque… Avec sa tabatière ;
Aloysius, au milieu des jurons et des cris,
Manque de s’y noyer… avec ses manuscrits ;
Le fidèle carlin de la vieille Gudule
Voit nager sa maîtresse… après son ridicule.
Veut les sauver tous deux, et périt sous les eaux !
Conrad enfin, Conrad, du milieu des roseaux,
Sort comme un dieu marin, et laisse dans la mare,
Le peu de voix qu’il doit à la nature avare !

Philine
O malheureux Conrad !

Laerte
O regrets superflus !
Il éternue encor ; - mais il ne chante plus !
Bref… Sans le secours de quelques paysans qui ont bien voulu les aider à se tirer de là et les remettre sur le bon chemin, c’en était fait de nos amis !... – Que dites-vous de l‘aventure ?... N’êtes-vous pas émue… ; attendrie ?...

Philine, avec indifférence
Pas du tout. Qu’est-ce que cela me fait ?

Laerte
(Ils se regardent et éclatent de rire.)
Et à moi donc ?

Philine, déclamant.
Je ris de leurs malheurs, comme ils riraient des nôtres !

Laerte
Quand tout va bien pour nous, pourquoi songer aux autres ?
La partition est abondante en motifs bien caractérisés. Dans le deuxième acte, on remarque une charmante styrienne ; la romance de Wilhelm : Adieu, Mignon, courage ! le duo pathétique : As-tu souffert, as-tu pleuré ? Dans le troisième acte, la berceuse : De son cœur j’ai calmé la fièvre ; une jolie romance : Elle ne croyait pas dans sa candeur naïve, dont le refrain : O printemps, est une phrase large et inspirée. Nous signalerons encore un chœur nautique élégant et le duo d’amour entre Wilhelm et Mignon, où une mélodie expressive et une harmonie variée se prêtent un mutuel secours. Il y a peu d’ouvrages dans le répertoire moderne de l’Opéra-Comique qui émeuvent autant le spectateur que l’opéra de Mignon. Il a obtenu un grand succès en France et à l’étranger. Dans plusieurs villes de l’Allemagne, on a remplacé le dialogue par des récitatifs dus à la plume de l’auteur. C’est sous cette forme que nous aurions préféré entendre l’ouvrage pour la première fois à Paris. Le personnage de Mignon a été interprété avec talent et de la première fois à Paris. Le personnage de Mignon a été interprété avec talent et de la manière la plus heureuse par Mme Galli-Marié. Les autres rôles ont été chantés par Léon Achard, Bataille, Couderc, Bernard Voisy, Davoust, Mme Marie Cabel. La mise en scène a fait honneur à l’expérience et au goût de M. Mocker.


Médecine des Arts®    
715 chemin du quart 82000 F-Montauban
Tél. 05 63 20 08 09 Fax. 05 63 91 28 11
E-mail : mda@medecine-des-arts.com
site web : www.medecine-des-arts.com

Imprimer

Association

Faire un don
Adhérer

Formation Médecine des arts-musique

Cursus Médecine des arts-musique