La mémoire, la méthode de travail au piano. Chronique d’un professeur de piano N°10

Mémoire auditive, visuelle, kinesthésique, conceptuelle

Je ne clorai pas le débat, je vais seulement faire le point sur les différentes mémoires utilisées par les pianistes (revue piano n°19). On en recense quatre : la mémoire auditive, visuelle, kinesthésique, conceptuelle. Chacune d’elle remplit un rôle différent, et c’est leur interaction qui permet la mémorisation.
La mémoire auditive, que l’on active par exemple en chantonnant, permet de repérer les fausses notes dans le jeu et permet d’anticiper ce que l’on joue dans les secondes à venir. Elle facilite la fluidité des enchaînements. La mémoire visuelle permet de photographier la partition et de la voir dans sa tête quand on joue : attention donc aux changements d’édition n’ayant pas la même pagination !

Piano,méthode de travail. Médecine des arts©

On raconte qu’un pianiste célèbre a eu un trou de mémoire en concert parce qu’il apercevait, dans le public, une petite fille qui suivait l’oeuvre sur une édition différente. Elle n’a donc pas tourné la page à l’endroit mémorisé par le pianiste, cela l’a déstabilisé.
Cette mémoire permet aussi de retenir visuellement le mouvement de ses gestes physiques. Cependant, les automatismes physiques font appel à la mémoire kinesthésique.
Cette dernière permet de mémoriser dans son corps et pas seulement visuellement, tous les mouvements, gestes, sensations physiques utilisés. On parle aussi dans ce cas de la mémoire du toucher, de la mémoire d’empreintes ou de la mémoire musculaire.
Ces trois mémoires, auditive, visuelle et kinesthésique, s’enregistrent passivement, elles créent les automatismes. Par contre la mémoire conceptuelle est une mémoire active, intentionnelle. La mémoire conceptuelle permet d’intégrer consciemment ses connaissances, elle demande un effort, elle comprend les notes, l’harmonie, les nuances, le phrasé, les points de repères. Elle permet de regrouper plusieurs données en un seul concept. (Par exemple, au lieu de mémoriser « do, ré, mi, fa, sol, la, si, do », huit concepts, on pense « gamme de do majeur » : un seul concept).

Bref, apprendre par coeur, c’est d’abord lire, comprendre et définir ce que l’on a à apprendre.
L’important est aussi d’apprendre à jouer avec une bonne méthode de travail. Je pense que jouer toujours par coeur est nocif, cela développe trop le capteur visuel, du coup, on ne regarde que ses mains, le cerveau ne calcule plus ses déplacements, et il peut s’ensuivre une mauvaise connaissance du clavier ou des difficultées de déchiffrage, surtout chez les jeunes pour lesquels la mémoire immédiate est très importante. De même, jouer toujours avec sa partition n’est pas recommandé, avoir le nez dans la partition empêche la mémoire conceptuelle et l’analyse globale de la partition, donc sa compréhension. L’idéal, à mon avis, est de savoir par coeur, mais de s’autoriser à garder la partition comme aide-mémoire ; cela rassure, mais tout le chemin de l’apprentissage aura été effectué.
Jouer sans partition est parfois tellement stressant que l’on fonce d’un bout à l’autre par peur du trou de mémoire. Cela va donc à l’encontre du but recherché et nuit parfois à la musicalité.
Michel Schneyder écrit : « Glenn Gould jouait comme s’il regardait son piano de tout son corps, jusqu’à oublier le piano et le corps », c’est peut-être cela l’idéal, regarder sans voir, prendre de la hauteur, de la distance. Tout ce qui concerne la mémoire fait donc partie de la méthode de travail dont je vais parler maintenant.

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