Tragédie

Poème dramatique

Poème dramatique qui représente une action importante entre des personnages illustres et propres à exciter la terreur et la pitié.

Le mot tragédie vient du grec tragos (banc) et de ôdé (chant). Boileau explique ainsi cette étymologie :

La tragédie, informe et grossière en naissant,
N’était qu’un simple chœur, où chacun en dansant,
Et du dieu des raisins entonnant les louanges,
S’efforçait d’attirer de fertiles vendanges.
Là, le vin et la joie éveillant les esprits,
Du plus habile chantre un bouc était le prix,
Eschyle, dans le cœur jeta des personnages.
D’un masque plus honnête habilla les visages ;
Sur les ais d’un théâtre en public exhaussé,
Fit paraître l’acteur d’un brodequin chaussé.

Sophocle et Euripide vinrent ensuite qui donnèrent à la tragédie cette grandeur et cette majesté terrible, qui en sont maintenant les qualités essentielles. Chez les Romains, on fut plus de trois siècles essentielles. Chez les Romains, on fut plus de trois siècles sans aucun spectacle dramatique, les jeux réguliers ne s’y établirent que vers l’an de Rome 514.

La tragédie était chez les anciens une institution politique. La Grèce fit ériger trois statues d’airain  Sophocle, Eschyle et Euripide ; elle ordonna que leurs tragédies seraient conservées dans les archives publiques. On les en tirait de temps en temps pour en faire la lecture parce qu’il était défendu aux comédiens de les représenter.

De grands personnages, tels que Gracchus, César, Auguste, Sénèque, etc., ne dédaignèrent pas de composer des tragédies. L’art dramatique dégénéra ensuite à Rome, et après le moyen-âge, il reprit, naissance en Italie et se propagea de là dans toute l’Europe. En France, Jodelle, le premier, composa et fit représenter une tragédie en 1552. Sa Cléopâtre eut un succès prodigieux, Garnier, Hardi, Rotrou suivirent successivement cet exemple, et firent briller quelques éclairs au milieu de l’obscurité où le théâtre était plongé ; mais il était réservé à Corneille d’élever tout-à-coup la scène au plus haut degré de splendeur par ses ouvrages. Ce fut en 1636 qu’il donna le Cid, la première tragédie dont nous puissions nous enorgueillir.

Aristote a défini la tragédie « l’imitation d’une action qui, par la terreur et la pitié, corrige en nous toutes sortes de passions. » Quelques auteurs ont mis à tort, le sentiment pénible de l’horreur, à la place de la terreur et de la pitié. Le comble de l’art, c’est de combiner le dernier degré de terreur que la tragédie puisse comporter avec l’intérêt qu’elle doit produire, de soulager le cœur après l’avoir déchiré, de faire succéder les larmes de l’attendrissement à l’épouvante et à la douleur.

Corneille eut un génie sublime, il sut créer ; il est grand, noble. Racine eut un talent admirable : il sut embellir ; il est parfait, gracieux.

Ce qu’on dit du style de la tragédie s’applique naturellement au jeu de l’acteur qui la représente. Ce style doit toujours se distinguer par une noble simplicité ; il n’admet rien d’ampoulé ni de bas, jamais d’affectation ni d’obscurité. Tous les vers doivent être harmonieux, sans que cette harmonie dérobe rien à la force des sentiments. Il ne faut pas qu’ils marchent deux à deux, mais que tantôt une pensée soit exprimée en un vers ; tantôt en deux ou trois, quelquefois en un seul hémistiche. Dans la tragédie, comme dans la comédie, on veut que le style soit approprié à l’état et aux affections de celui qui parle. Un roi en doit pas s’exprimer comme un simple particulier, un soldat comme un cultivateur. La sensibilité humaine est le principe d’où part la tragédie, le pathétique en est le moyen, l’horreur des grands crimes et l’amour des sublimes vertus sont les fins qu’elle se propose.

Dictionnaire de l’art dramatique A l’usage des artistes et des gens du monde Ch. De Bussy Paris, Achille Faure, 1866


 

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