Sauvages (musique des)

Musique des Sauvages

On sait bien que les peuplades sauvages n’ont pas de véritable musique ; elles ne se servent guère que d’instruments à percussion. Les Esquimaux, qui étaient aussi près de l’état de barbarie que possible, lorsque le capitaine Parry les visita, étaient cependant passionnés pour la musique. lls n’avaient pour tout instrument, qu’une espèce de tambour ou de tambourin. Ils chantaient des airs ; mais on y trouvait ni variété, ni étendue, ni mélodie caractérisée. Les Mexicains, lors de la conquête de leur pays par les Espagnols, n’étaient guère plus avancés sous le rap-port musical. Leurs principaux instruments étaient deux tambours, l’un nommé le hueheutl, l’autre le teponaztli. Ils avaient aussi des trompes, des coquilles marines, des petites flûtes qui rendaient un son aigu, et un instrument dont se servaient leurs danseurs, appelé ajacaztli. C’était une sorte de vase rond ou ovale, percé de petits trous et contenant un certain nombre de petites pierres, instrument à peu près du même genre que le hochet des enfants. M. Weld, dans sa notice sur les Indiens du nord-ouest de l’Amérique, donne la description suivante d’une danse dont il fut le témoin, un soir, dans l’île des Bois-Blancs : « Trois vieillards, assis sous un arbre, étaient les principaux musiciens ; l’un d’eux battait un petit tambour formé d’un morceau de bois creux couvert d’une peau, et les deux autres frappaient la mesure de concert avec le tambour, au moyen d’une sorte de crécelle faite d’une courge sèche remplie de pois. En même temps, ces trois hommes chantaient un air, et tous les danseurs se joignaient à eux. »
Ce que nous savons des naturels des îles de la mer du Sud, quand elles furent découvertes par le capitaine Cook, prouve également la grossièreté et la simplicité de la musique des tribus sauvages qu’elles renfermaient. Quatre personnes jouaient sur deux flûtes faites de bambous creux, d’environ un pied de long, n’ayant que deux trous, et ne pouvant donner par conséquent que quatre notes divisées par demi-tons. On s’en servait comme nous nous servons de la flûte allemande, avec cette différence que l’exécutant, au lieu de l’appliquer à ses lèvres, soufflait dedans avec une de ses narines pendant qu’il bouchait l’autre avec le pouce. A ces instruments se joignaient quatre chanteurs qui observaient fort bien la mesure. Dans un concert on n’exécutait souvent qu’un seul air. Dans les îles des Amis il y avait des femmes qui chantaient et s’accompagnaient en faisant claquer leurs doigts. La musique de ces peuples est encore maintenant aussi barbare que lorsqu’ils furent visités par le capitaine Cook. Les Indiens du Chili se servent de flûtes faites avec les os des ennemis qu’ils ont tués dans les combats ; ils en font aussi avec des os d’animaux ; mais les guerriers indiens ne dansent qu’au son des premières. Ils chantent tous à l’unisson, et à la fin de chaque air ils jouent de la flûte et d’une espèce de trompette ; nos ritournelles ont le même but. Les habitants de l’île de Tougo chantent souvent une chanson, espèce de récitatif, dont les idées sont assez poétiques, et qui est dite par les hommes et les femmes tout à la fois. Us ont aussi un air mélancolique, sorte de complainte qu’ils chantent près des morts, comme le Dies irae. Une tribu de Cafres, les Bachapins, n’ont qu’un seul instrument appelé lichaka, fait de roseau, et ne rendant qu’un seul son. Il y en a un pour chaque note, et lorsque plusieurs exécutants sont réunis, une partie joue à l’unisson pendant que les autres font entendre différents tons de l’échelle musicale. Cet usage rappelle assez l’emploi de la pédale dans les orgues modernes. Ce qui frappa le plus les sauvages, c’est le rythme : on a pu s’en convaincre en assistant aux danses de ceux qui sont venus, il y a quelques années, amuser les parisiens.

Dictionnaire de musique, Léon et Marie Escudier, 1872


 

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