Raccourci

Peinture

Nom masculin
Est la représentation perspective d’un objet, sous un point de vue tel que la succession des plans, au moyen de laquelle nous aurions la perception de son étendue, se dérobe à nos yeux, soit que ces plans s’offusquent l’un l’autre, soit que les faisceaux de lumière auxquels ils servent de base, nous en rapportent l’image sous un angle toujours plus étroit, à mesure qu’ils se resserrent. Or, il en arrive ainsi de tout objet que l’on regarde de haut en bas, ou de bas en haut, ou bien qui se présente à notre horizon de bout en bout. Telle est, pour exemple, une tête que l’on regarde face à face. Sous cet aspect, la succession entière des plans depuis le sommet du front jusqu’au bas du menton, s’offre à la vue sans aucun retranchement, sans aucune altération. Mais que cette tête vienne à se jeter en arrière : à mesure qu’elle se renversera, la partie la plus saillante du menton nous dérobera la vue de celle qui l’est le moins ; il en sera de même de la saillie de la lèvre supérieure à l’égard de l’espace entre cette saillie et celle du nez, et de la saillie du nez à l’égard de la partie renfoncée entre les sourcils, et de la saillie des sourcils à l’égard du front, etc.
Faute d’apercevoir ces parties ainsi offusquées les unes par les autres, on n’aura qu’une perception incomplète de la longueur réelle de cette tête ; on la verra en raccourci. Il en serait de même, bien que la cause en fût moins manifeste, d’un solide dont la surface n’offrirait aucune sinuosité.
Supposez, sur un plan horizontal, à la hauteur de votre œil, un cylindre debout, tel qu’un fût de colonne. Pourvu que la distance de ce cylindre soit égale au moins à sa hauteur, vous le voyez dans toute son étendu verticale. Mais faites que, sans pencher ni à droite ni à gauche, il se renverse en arrière, jusqu’à être couche sur le plan horizontal ; vous cesserez alors d’apercevoir aucun des points de son étendue verticale ; et tandis que, pour opérer ce changement de position, il aura décrit dans l’espace un quart de cercle, vous l’aurez vu parcourir successivement tous les degrés possibles du raccourci. Cette opération des raccourcis est soumise aux lois générales de la perspective linéaire ; ses effets se peuvent déterminer d’avance par des lignes géométriques. Toutefois, les peintres ont fait de ce qu’on appelle le raccourci l’objet d’une science, ou plutôt d’un savoir-faire particulier, qui représente avec vérité au moyen du clair-obscur, non moins que suivant les règles de la perspective linéaire, les effets du raccourci. Ces effets, qui ne sont sensibles aux yeux du vulgaire qu’autant qu’ils résultent d’attitudes ou de positions inusitées dans la nature, sont rarement agréables en eux-mêmes.
Leur mérite en peinture n’est guère que celui de la singularité des aspects sous lesquels ils présentent les objets tout autrement qu’on n’est accoutumé à les voir. L’usage des raccourcis est surtout fréquent dans les plafonds où l’on présente les objets comme devant être vus de bas en haut. (Voir Anamorphose).
Edouard Rouveyre. Comment apprécier les croquis, esquisses, études, dessins, tableaux, aquarelles, pastels, miniatures. Librairie G. Baranger fils, 1911


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