Pas à danser

Au XVII° et au XVIII° siècle, nos compositeurs, lorsqu’ils introduisaient dans leurs opéras un divertissement dansé, ne cherchaient pas, comme d’autres le firent plus tard, à donner à leurs airs de ballets une forme plus ou moins piquante, originale et personnelle. Un certain nombre de coupes traditionnelles étaient adoptées alors, et l’on ne sortait jamais de ce cercle un peu restreint, dans lequel on ne rencontrait guère plus d’une quinzaine de moules invariables, qui prenaient le nom générique d’airs à danser. Nous allons en donner ici la nomenclature.

  • La Bourrée, qui nous venait des danses populaires de l’Auvergne, était à deux temps, d’un mouvement lourd et à moitié lent.
  • Le Canarie (ou les Canaries) se rapprochait un peu de la gigue, mais avec un rythme moins accentué et un mouvement plus lent. Il s’écrivait à 6/8.
  • La Chaconne ne date guère que du dix-huitième siècle. C’était une grande danse d’ensemble, à grands développements, qui généralement venait à la fin d’un opéra pour le terminer d’une façon très brillante et très mouvementée, le maître de ballet y trouvant toute latitude pour faire des groupes, des marches, des évolutions d’un grand effet. Dans l’Union de l’Amour et des Arts (1773), Floquet a écrit une chaconne qui a fait courir tout Paris et qui est restée longtemps célèbre ; elle était à deux temps, bien que le rythme traditionnel de cette danse fût à trois temps.
  • La Courante est une danse du XVII° siècle ainsi nommée à cause des allées et venues dont elle était remplie plus qu’aucune autre. C’était cependant une danse grave, d’un rythme musical assez tranquille, dont la musique s’écrivait à trois temps.
  • La Forlane, danse originaire du Frioul, était, dit-on, la passion des gondoliers de Venise. On l’écrivait à 6/8, dans un mouvement modéré. On en trouve une charmante dans les Sybarites, de Rameau (1757).
  • On connaît la Gavotte dont le rythme modéré, plein d’élégance, était aussi charmant au point de vue de la danse que de la musique. Elle était toujours à deux temps. Les gavottes de Gluck sont adorables.
  • Le Gigue s’employait beaucoup moins souvent, et seulement pour la danse comique, à laquelle convient son mouvement à la fois lourd et rapide. Elle s’écrit à 6/8.
  • Le Menuet, cousin germain de la gavotte par la grâce et par l’élégance, était au contraire d’un emploi fréquent. Gluck en a aussi composé de charmants, entre autres ceux d’Orphée et d’Armide, qui sont de véritables bijoux. Le rythme du menuet est ternaire.
  • Les Musettes étaient innombrables dans nos anciens opéras, et l’on assure que Mlle Sallé et Dumoulin « les dansaient avec autant de grâce que de volupté ». C’était une danse d’un mouvement modéré, qui s’écrivait soit à deux temps, soit à 6/8. Dans les Fêtes de l’Été (1716), Montéclair a placé une musette exquise.
  • La Passacaille, danse favorite du fameux Dupré, était d’un mouvement lent et majestueux ; c’est ce qui la différenciait du menuet, dont elle se rapprochait par le rythme.
  • Le Passepieds était au contraire une danse très vive, très rapide, à mesure ternaire, et qui, dit-on, nous venait de Bretagne. Musicalement, il admettait la syncope, ce qu’on ne voit ni dans le menuet, ni dans la passacaille. « Mlle Prévôt, dit Noverre, courait les passepieds avec élégance. » Campra, qui a laissé un nombre incalculable d’airs à danser, a écrit dans l’Europe galante (1697) un passepieds adorable.
  • Majestueuse et lente comme la passacaille, mais s’écrivant à quatre temps, la Pavane a longtemps aussi régné au théâtre, après avoir été importée d’Espagne en France. Son nom lui venait de ceci, que ceux qui la dansaient faisaient la roue l’un devant l’autre, comme les paons font avec leur queue. « Les gentils-hommes, disait un écrivain du dernier siècle, la dansaient avec la cape et l’épée, les gens de justice avec leurs longues robes, les princes avec leurs grands manteaux, et les dames avec les queues de leurs robes abaissées et traînantes. »
  • Le Rigaudon nous venait, dit-on, de Provence et de Languedoc, où il avait été inventé par un maître à danser nommé Rigaud, qui lui aurait laissé son nom. C’était une danse à deux temps, d’un mouvement modéré, et dont le rythme, d’ailleurs très varié, n’était pas sans élégance. On connaît le rigaudon fameux du Dardanus, de Rameau ; Desmarets dans Circé (1694), Philidor dans Ernelinde (1767), en ont écrit deux fort jolis.
  • La Sarabande, comme la pavane, était originaire d’Espagne, et, comme elle aussi, avait un caractère grave et presque sérieux. Elle était à trois temps et d’un mouvement lent.
  • Le Tambourin, de même que la musette, tirait son nom de l’instrument qui lui avait donné naissance, et nous venait de la Provence chérie du soleil. C’était un air à deux temps, leste, gai, vif, mouvementé, qui apportait avec lui la joie et la bonne humeur. A côté du tambourin de Rameau, devenu si célèbre dans les Fêtes d’Hébé, il faut citer celui, si plein d’élégance, que Grétry écrivit dans Aspasie. Le tambourin était le pas favori de l’illustre Camargo.

A la suite de ces différents airs à danser, nous nous bornerons à mentionner la Gaillarde, la Toccata et les Tricotets, dont l’emploi au théâtre fut beaucoup plus rare et seulement accidentel.

Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d ‘Arthur Pougin, 1885


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