Opérateur

La Dame Blanche (acte III)

Qui dit charlatan, marchand d’élixir, arracheur de dents, dit charlatan, marchand d’élixir, arracheur de dents, dit opérateur, et tous ces métiers réunis n’en forment qu’un seul, baptisé jadis de ce seul nom d’opérateur. Celui-là n’était pas toujours par lui-même un saltimbanque, mais il s’entourait, pour ameuter la foule, de gens dont telle était la spécialité, et c’est ainsi que les opérateurs doivent tenir leur place dans description des spectacles populaires. Dès le treizième siècle, ces pseudo populaires. Dès le treizième siècle, ces pseudo populaires. Dès le treizième siècle, ces pseudo-médecins, doublés de bouffons émérites, s’installaient dans les rues de Paris pour débiter, s’installaient dans les rues de Paris pour débiter leurs marchandises, à grand renfort de discours saugrenus, de lazzis grotesques et de contorsions excentriques. Un peu plus tard, quelques-uns d’entre eux se font une clientèle parmi les badauds, qui se passent de bouche en bouche les noms de Malassegnée, de Mauloue, de Malassis ; un peu plus tard encore, il en est qui deviennent tout à fait célèbres, qui font oublier leurs devanciers et qui révolutionnent véritablement Paris : Barry, Orviétan, Tabarin surtout, ont laissé un nom qui est parvenu jusqu’à nous. A cette époque, les opérateurs s’établissaient principalement sur le Pont-Neuf, foire ambulante et perpétuelle où toute la cille se donnait rendez-vous :

Pont-Neuf, ordinaire théâtre
De vendeurs d’onguent et d’emplâtre,
Séjour des arracheurs de dents…,
D’opérateurs et de chymiques
Et de médecins spagyriques

(La ville de Paris en vers burlesques)

« Il y en avait, dit M. V. Fournel, de toutes sortes et de tous étages, depuis le pauvre diable qui portait lui-même sa boîte à médicaments sous le bras jusqu’à celui qui traînait à sa suite toute une bande d’auxiliaires. Les plus riches possédaient de vraies troupes de comédies, qui eussent pu lutter sans désavantage contre celle des principales villes de province, et ils attiraient le public à leurs drogues en l’amusant par des lazzis, des chansons, des parades et des farces, sans oublier les prospectus pompeux qu’ils faisaient distribuer à foison dans les alentours du cheval de bronze, et les affiches dont ils tapissaient tous les coins de rue. »
Aujourd’hui qu’on nous a fait un Paris tellement propre et tellement ratissé que pour un peu l’on empêcherait d’y marcher, le spectacle populaire, le spectacle des rues, ce spectacle charmant, toujours nouveau, toujours amusant, que l’on y voyait naguère avec tant de joie, a complètement disparu. On n’y voit donc plus d’opérateurs, et le dernier de la bande est parti pour l’autre monde dans la personne de Mangin, le fameux marchand de crayons, l’homme au casque brillant, qui égayait encore les passants en compagnie de son inséparable Vert-de-gris, lequel tournait avec un implacable sang-froid la manivelle de son orgue de Barbarie. Mais de tous les opérateurs passés, présents et futurs, le plus illustre sera toujours Tabarin, dont les farces ont été pieusement recueillies par des lettres avisés, et que M. Paul Ferrier a fait revivre, il y a quelques années, à la Comédie-Française, dans une petite pièce où l’ancien héros du Pont-Neuf était personnifié par M. Coquelin aîné. Ce n’était pas le première fois, d’ailleurs, qu’on transportait sur la scène la personne d’un de ces farceurs épiques : en 1702, Dancourt faisait représenter sur ce même théâtre de la Comédie-française, dont il était l’un des acteurs les plus estimés, une sorte de petite farce en un acte avec prologue, intitulée l’Opérateur Barry, dont de Léris parle en ces termes : « Il n’y a que le prologue qui ait rapport au docteur ( !) Barry qui était un fameux charlatan du commencement du dix-septième siècle ; la pièce est une espèce de petite farce, telle que cet empirique en faisait représenter sur son théâtre, qui était au Château-Gaillard, au bout de la rue Guénégaud, vers l’endroit où est présent l’abreuvoir. »

Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d'Arthur Pougin, 1885


 

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