Monodie

s.f.
Chant à voix seule, par opposition à ce que les anciens appelaient chorodies, ou musiques exécutée par le chœur.
Dictionnaire de musique, Jean-Jacques Rousseau, 1767

 

 Nous avons au mot hyporchème, mentionné les monodies ou chants à une voix usités dans la Grèce antique, et qui furent l’une des premières manifestations et des formes rudimentaires du théâtre. Voici comment Charles Magnin caractérise les monodies : Plusieurs monuments antiques nous montrent des hommes et surtout des femmes qui chantent et qui dansent seuls. Dicéarque nous a conservé les premiers vers d’une monodie religieuse ; c’est un hymne en l’honneur de Diane dansé par une femme seule, tandis qu’une autre femme marque la mesure aves des crembales : « Diane, j’ai résolu de chanter à gloire un hymne qui te plaise, tandis que cette femme fera résonner dans ses mains des crembales d’airain doré. » Les monodies étaient lyriques quand l’exécutant chantait ses propres émotions et ses sentiments personnels ; elles étaient dramatiques, au contraire, quand il se présentait sous un nom d’emprunt, et exprimait les passions supposées d’un personnage fictif. Le plus admirable exemple que nous ayons d’une monodie dramatique est la Magicienne de Théocrite, imitée et non pas égalée par Virgile. On peut citer encore la troisième idylle de Théocrite, intitulée le Chevrier.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d'Arthur Pougin, 1885

 

 s.m.
Scène d’opéra où l’acteur est seul et ne parle qu’avec lui-même. C’est dans les monologues que se déploient toutes les forces de la musique ; le musicien pouvant s’y livrer à toute l’ardeur de son génie sans être gêné dans la longueur de ses morceaux par la présence d’un interlocuteur. Ces récitatifs obligés, qui font un si grand effet dans les opéras italiens, n’ont lieu que dans les monologues.
Dictionnaire de musique, Jean-Jacques Rousseau, 1767

 

 Long récit que, dans une scène seule, l’un des personnages d’une action dramatique se fait en quelque sorte à lui-même, et qui ne lui sert à expliquer au spectateur l’état de son âme ou à exposer certaines situations. « La parole, a dit Marmontel, est un acte si familier à l’homme, si fort lié par l’habitude avec la pensée et le sentiment, elle donne tant de facilité, tant de netteté à la conception, par les signes qu’elle attache aux idées, que, dans une méditation profonde, dans une vive émotion, il est tout naturel de se parler à soi-même… Il n’est personne qui quelquefois ne se soit surpris, se parlant à lui-même de ce qui l’affectait ou l’occupait sérieusement. Il est donc très vraisemblable que l’avare à qui l’on vient d’enlever sa cassette, fasse entendre ses cris et ses plaintes ; que Caton, avant de se donner la mort, délibère à haute voix sur l’avenir qui l’attend ; qu’Auguste, qui vient de voir le moment où il était assassiné, se parle et se reproche tout le sang qu’il a répandu ; qu’Orosmane, croyant Zaïre infidèle et l’attendant pour se venger, dans l’égarement de sa fureur parle seul et parle tout haut. » Parmi les monologues les plus fameux au théâtre, il faut citer celui de l’Avare, de Molière, rappelé par Marmontel, celui du Mariage de Figaro, de Beaumarchais, ceux de l’Hernani et du Ruy Blas de Victor Hugo, sans compter l’incomparable monologue que Shakespeare a placé dans la bouche d’Hamlet.
Dans la première moitié du dix-huitième siècle, à l’époque où les petits théâtres de la Foire étaient constamment traqués, vexés et tyrannisés par leurs suzerains l’Opéra et la Comédie-Française, qui leur cherchaient chicanes sur chicanes, ils en furent un instant réduit à ne jouer que des pièces en monologues. C’est quand on leur interdit d’avoir en scène plus d’un acteur à la fois : alors le personnage présent devant le public débitait un monologue, après quoi il disparaissait pour laisser la place à un nouveau personnage qui continuait l’action à l’aide d’un autre monologue, et ainsi de suite pendant le cours d’un, de deux ou de trois actes. Nos forains, sous ce rapport, n’étaient jamais à bout de ressources, et trouvaient toujours le moyen de tourner les difficultés ; et tel a toujours été l’amour du Parisien pour le spectacle, telle était sa sympathie pour ces pauvres petits théâtres qu’on persécutait sans cesse, qu’il y accourait toujours et ne les encourageait que davantage. On conçoit cependant combien l’art, même un art subalterne, était difficile dans de telles conditions. Parmi les pièces en monologue données à cette époque, on peut citer le Lourdaud d’Inca, de Fuzelier, Arlequin barbet, pagode et médecin de Lesage et d’Orneval, la Fille savante, etc. Sous la révolution, pendant la première liberté des théâtres, la mode courut un instant de petites pièces mêlées de chant ne comprenant qu’un seul personnage, et formant un long monologue. On eut ainsi Gilles tout seul, de Bizet et Simonnot ; Fauchon toute seule, de Ponet ; M. Botte tout seul, du même ; Je débute ou l’Acteur tout seul, de Rougemont ; Colobine toute seule, de Morel, Marty et Philibert ; Cassandre tout seul, de Dubois ; Figaro tout seul ou la Folle Soirée, de Marty. Ces deux derniers monologues étaient joués, au théâtre des Jeunes-Artistes, par un acteur encore imberbe qui devait être un jour une des gloires de la Comédie-Française : Monrose père.
Aujourd’hui, et depuis quelques années, une autre manie sévit sur Paris, celle du monologue de salon. On en voit surgir de tous côtés, en prose ou en vers, et il n’est pas de semaine où il n’en paraisse quelques-uns. Le chef-d’œuvre du genre est assurément celui qu’un de nos jeunes écrivains dramatiques.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885


 

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