Matassin

Dans le divertissement de Monsieur de Pourceaugnac, Molière a introduit des matassins. On ne sait plus beaucoup aujourd’hui ce que c’était que les matassins et quelle était leur spécialité ; Castil-Blaze va nous l’apprendre : Dossier les matassins, dit-il, c’était, dans le moyen âge, imiter la pyrrhique des Grecs, la danse des Saliens, prêtres de Mars institués par Numa. Cette danse religieuse et guerrière, que les Saliens exécutaient l’épée à la main, portant au bras de petits boucliers sur lesquels ils frappaient en cadence avec leurs glaives, devint une parade bouffonne lorsque les Italiens et les Espagnols s’avisèrent de la renouveler des Grecs. Vêtus d’un costume bizarre et de fantaisie, le pot en tête, ces modernes baladins se battaient à deux, à quatre, à six, à huit, etc., en dansant. Quoique armés de sabres de bois, ils feignaient d’être blessés et tombaient, restant sans mouvement, comme s’ils étaient morts. De là vint leur nom de matassins, formé des verbes espagnols matar, tuer et fingir, feindre. Matado fingido, par contraction, devint matafin, et matachin, matachine, d’om nous avons fait matassin. La batte d’Arlequin n’est autre qu’une épée de matassin. Les italiens disent aussi mataccino, mataccinata.
De son côté, Thoinot Arbeau, qui écrivait dans les dernières années du seizième siècle, décrit ainsi la danse des matassins, qui, on va le voir, touchait de bien près à l’escrime : (le texte suivante est ancien français)

Les Bouffons ou Mattachins sont vêtus de petits corcelets avec fimbries ès épaules, et soubs la ceinture, une pente de taffetas soubs icelles ; le morion de panier doré, les bras nuds, les sonnettes aux jambres, l’espée au poing droit, le bouclier au poing gauche : lesquels dancent soubs un air à ce propre, et par mesure binaire, avec battements de leurs espées ou boucliers. Pour comprendre ceste dance, fault présupposer qu’on y fait plusieurs sortes de gestes : l’un des gestes est appellée feincte, quand le danceur saulte sur ses pieds joincts, tenant son espée sans en toucher aucunement : l’aultre geste est appelé estocade, quand le danceur recule son bras, et avance la poincte de son espée, pour frapper d’icelle son compagnon.
L’aultre geste est appelle taille haulte, quand le danceur frappe son compagnon en descendant et fauchant de la main droicte (de laquelle il tient son espée), à la main senestre : l’aultre est appelle revers hault, quand au contraire le danceur frappe son compagnon en fauchant et descendant dès sa main senestre à sa main droite : l’aultre geste est appelle taille basse, quand le danceur frappe son compagnon en montant de la main droicte à la senestre : l’aultre geste est nommé revers bas, quand le danceur frappe son compagnon en montant de la main senestre à la droicte.

En voilà assez pour faire connaître les personnages de Molière a mêlés à ses divertissements.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d'Arthur Pougin, 1885


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