La méthode Feldenkrais pour un usage optimal de soi particulièrement adapté pour le musicien, le chanteur, le danseur

La Méthode Feldenkrais en pratique

Feldenkrais fin

La méthode Feldenkrais se pratique sous forme de leçons de groupe ou de séances individuelles. Dans les leçons de « Prise de Conscience par le Mouvement » (PCM ), leçons de groupe, utilisables en séance individuelle aussi, le mouvement, exécuté par le sujet lui-même, est guidé par la parole, par les indications verbales données par le praticien. En revanche, le mouvement, dans les séances d’« Intégration Fonctionnelle » (IF) qui sont toujours individuelles, est guidé par les mains du praticien dans une communication non-verbale. Les deux situations offrent un contexte d’éveil : éveil à soi-même à travers les sensations kinésthésiques suscitées, à travers des informations sensori-moteurs.

La leçon de Prise de Conscience par le Mouvement (PCM)

La leçon de PCM se déroule le plus souvent au sol, dans différentes configurations : couché sur le dos, sur le ventre, sur le côté, assis de différentes manières, à quatre pattes, etc. Elle peut se dérouler entièrement ou en partie debout, là aussi dans toutes les configurations imaginables, mais en général, il s’agira de personnes ayant déjà une petite expérience de la méthode. Pourquoi au sol ? Tout simplement pour réduire au minimum les informations venant d’une interaction de l’organisme avec la pesanteur. « Quand la pression n’est plus répartie sur la plante des pieds, le cortex moteur, comme le corps tout entier, est libéré des schémas de la station debout. Ce sera peut-être la première fois [...] que de nouveaux schémas de remplacement se formeront à travers les connexions du cortex et que votre comportement en sera transformé. »[4] Nous pouvons, dans ce contexte-ci, rapporter l’expérience réalisée par l’équipe du Professeur Berthoz [1], où un homme se trouve à l’horizontale dans un mouvement de rotation autour de son axe longitudinal (comme un barbecue !). Il a suffi, lors de cette expérience, de toucher la plante des pieds du sujet pour lui donner la sensation de tourner debout !
Cette situation en décubitus ou assis ou à quatre pattes, en enlevant les informations habituelles captées par le cerveau, en enlevant une partie de l’activité anti-gravitationnelle habituelle, en créant un contexte parfois tout à fait nouveau du point de vue de cette activité-là, obligera le cerveau et tout le système neuro-musculaire à venir à bout de cette situation inconnue, créant ainsi de nouvelles voies sensori-motrices et de nouvelles synergies de mouvement. « En fait, moins il est stimulé, plus le système nerveux tend vers son fonctionnement optimal [...] Le cortex volontaire est plus disponible pour la formation de nouveaux schémas corporels que lorsque tout le système est engagé dans une activité quelconque, qu’elle soit intentionnelle ou automatique. »[4, p.161].

Bien que ce ne soit pas une règle, les mouvements se font souvent les yeux fermés. Ceci permet une « écoute » sensorielle plus aisée, surtout lorsqu’on débute dans la méthode. Les capteurs visuels étant éliminés, le système nerveux doit se rabattre sur d’autres récepteurs. Selon A. Berthoz, quand le cerveau en a le choix, il donnera priorité aux informations arrivant par les capteurs visuels sur celles arrivant par d’autres types de capteurs (vestibulaires, proprioceptifs). [1]

Dans une leçon de PCM, les mouvements exécutés s’inscrivent dans un thème choisi par le praticien ; cela peut être un thème concernant une fonction générale (flexion, extension, torsion, le regard...) ou une fonction de la vie quotidienne (s’asseoir, se lever...). Une leçon de PCM débute par les composantes du mouvement et n’évoquent pas nécessairement l’action finale.
Ils sont exécutés lentement pour mieux garantir leur inscription dans une prise de conscience et pour éviter tout risque de retomber dans un schéma habituel. « La lenteur est nécessaire pour démasquer les efforts superflus ou parasites et permettre leur élimination partielle. Dans l’action, le superflu est bien plus néfaste que l’insuffisant, car il coûte des efforts inutiles. » [4, p.116]
De plus, le fait d’exécuter lentement les mouvements place davantage l’attention sur le comment du mouvement que sur sa finalité, sur le chemin plutôt que sur le but à atteindre.

Ils peuvent parfois être de très petite amplitude, jusqu’à ne plus être faits que dans l’imagination. (L’imagerie médicale a pu mettre en évidence que les zones corticales normalement activées lors du mouvement le sont aussi lors du mouvement imaginé.) Ces micro-mouvements auraient tendance à réduire la tonicité musculaire jusqu’au niveau optimal pour l’action à accomplir et à faire disparaître les mouvements « parasites » inutiles. En outre, ils créeraient les conditions propices à une « écoute » de sensations très fines car selon la loi de Weber-Fechner (XIXe siècle), il existerait une relation logarithmique entre la sensation et le stimulus, à savoir : la perception d’une différence entre deux stimuli très forts ne peut se faire que lorsque cette différence est très importante. A l’inverse, la perception de différences très petites peut se faire lorsqu’il s’agit de stimuli très faibles.

La leçon d’Intégration Fonctionnelle (IF)

Dans ces séances individuelles où le mouvement du sujet est guidé par les mains du praticien, le sujet n’est pas l’« exécuteur » de ses mouvements, il reste souvent dans une relative passivité mais en fait, il y a une sorte de « duo » qui se forme entre le praticien et le sujet, où l’on ne sait plus vraiment qui mène la danse. Les mains du paticien proposent, le sujet accepte (ou pas) la proposition. Dans ce dernier cas, le praticien corrige le tir et propose autre chose. Moshe Feldenkrais dit : « Je souhaite transmettre quelque chose qui pourrait l’aider [le sujet] à réorganiser son image corporelle dans l’action afin que sa vie devienne plus simple, ou même plus agréable. »[4, p.182] « Quand la stimulation a été répétée une vingtaine de fois, il m’arrive de sentir que la personne allongée se souvient de certains schémas corporels familiers et perçoit qu’une nouvelle organisation neurale est en train de se former. »[4, p.162] Chez la personne handicapée, c’est en se « substituant à son environnement le plus proche, à la fois gravitationnel et humain », que le praticien fait exécuter un mouvement de façon assez répétitive pour que son fonctionnement erratique puisse finalement reconnaître qu’il est possible d’organiser les choses selon un certain ordre. »[4, p.164]
  « A chaque séance, quelque chose de nouveau, d’imprévu et d’inattendu, sera effectué, ainsi le système nerveux de la personne sera-t-il toujours vigilant et curieux, sinon il stagnera... et ses minces progrès ne vaudront pas le déplacement. »[4, p.165]
Tania Kraus pour Médecine des arts®
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Source

Extrait du mémoire pour l'obtention du diplôme Médecine des art®, la partie du mémoire concernant La méthode Feldenkrais et le musicien est publiée dans la Revue Médecine des arts n°81

Bibliographie

- [1] Alain Berthoz, Conférence, Paris, 24-25 mai 2003.
- [2] Deschaussées M., La musique et la vie, Buchet-Chastel, Paris 1988
- [3] Bachmann M. L., La Rythmique Jaques-Dalcroze, La Baconnière, Neuchâtel (Suisse), 1984.
- [4] Feldenkrais M. L’évidence en question, L’Inhabituel, Paris 1997
- [5] Feldenkrais M. Body and Mature Behavior, International Univ. Press Inc. Connecticut, USA 1996
- [6] Feldenkrais M. The Master Moves, Meta Publications, Californie, USA 1984.
- [7] Gilles Péninou lors des 5e Rencontres Internationales de Médecine et Musique, Montpellier, 10-11 octobre 2003
- [8] Heinrich von Kleist, Betrachtungen über den Weltlauf, Verlag Freies Geistesleben, Stuttgart, 1958.

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