Graveleux

Une situation, une scène graveleuses, un mot, un coupler graveleux, sont choses qui se reproduisent assez volontiers dans certains théâtres, où les oreilles des spectateurs sont moins prudes, moins chastes que dans d’autres. Chose singulière, et qui peut donner une idée des mœurs, des coutumes en matière de théâtre ! Placez un spectateur dans la salle du Palais-Royal ou dans celle des Variétés, il rira de grand cœur et de bon aloi à une plaisanterie fortement épicée, à un mot vigoureusement salé, si même, pour me servir d’une expression pittoresque, il est arrivé à l’auteur de renverser la salière. Mais transportez ce spectateur, le même, à cinq cents mètres de là, dans la salle du Gymnase, et vous le verrez s’effaroucher vertueusement et bondir d’indignation à l’audition d’un mot relativement bénin, d’une expression à peine hasardée qui l’aurait tout au plus fait sourire dans un autre milieu. Ce serait le cas de répéter le vieux dicton : « Vérité en deçà, erreur au-delà ; » mais cela prouve qu’au théâtre, comme en géographie, il y a des latitudes.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d'Arthur Pougin, 1885


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