Dyskinésie et dystonie induites par le primpéran chez une musicienne lors d'une croisière

Mal de mer, prise de primpéran et mouvements involontaires chez une musicienne

mal de transport et musique

 

 

 

 

 

 

 

 

Le tourisme de croisière est un secteur d’activité en pleine expansion, les artistes, musiciens, chanteurs, danseurs s’y adonnent quelquefois quand ils n’y sont pas invités pour distraire les croisiéristes.

Madame B. est une jeune musicienne de 25 ans qui participe à cette croisière. Ce soir-là, elle a de manière inhabituelle bu quelques verres de vin à bord. Lorsqu’elle a voulu se coucher, elle s’est sentie un peu vaseuse. Durant la nuit, la mer a été agitée. Au réveil, la musicienne s’est présentée au service médical à bord, car elle avait des nausées, des vertiges, des vomissements.

Un traitement classique délivré à bord pour ce type de dérangement, « le mal de mer », lui a été administré, 10 mg de métoclopramide (Primpéran) par voie intramusculaire et 25 mg de diphenhydramine (antihistaminique).

Immédiatement après les injections, elle s’est sentie fatiguée et confuse et si les vomissements cessèrent, les vertiges persistèrent. Par la suite, il lui a été prescrit deux comprimés de primpéran de 10 mg deux fois par jour. Mais après avoir pris 5 mg la nuit, elle a été prise d’anxiété, de fatigue, d’étourdissements. Le lendemain son état était similaire, elle a repris à nouveau 5 mg de métoclopramide deux fois dans la journée. Le lendemain elle n’a pris aucun traitement. Mais le troisième jour elle a pris 10 mg de metoclopramide dans la soirée, et peu de temps après la musicienne avait des pensées suicidaires irrationnelles, des palpitations, des sensations somatiques étranges, qu’elle a mis sous le compte du traitement.

Après un total de 40 mg de métoclopramide (dont 10 mg par voie intramusculaire + 30 mg par voie orale) administré pendant 4 jours. Malgré l’arrêt du traitement, Madame B. a continué à ressentir des symptômes perturbateurs qu’elle a attribué au traitement. Ces symptômes étaient des vertiges ; une anxiété, des idées suicidaires ainsi que des mouvements involontaires (des spasmes musculaires, des saccades musculaires, tics, tremblement des paupières, de la langue, des doigts et des bras et des jambes) de quelques secondes à quelques minutes.

Elle a pu travailler son instrument, mais elle sentait  qu’elle contrôlait mal les mouvements de ses doigts en jouant son instrument.

Effets indésirables du primpéran tels que des mouvements involontaires chez une musicienne

A l’accostement, la musicienne a fait un bilan chez un neurologue, réalisée une IRM qui n’a décelé aucun signe pathologique. Mais le neurologue consulté a confirmé que ces symptômes pouvaient être des effets indésirables de la métoclopramide. Ces effets sont tout à fait connus pour des doses significatives de primpéran sur une longue durée, au-delà de 5 jours.

Dix mois après la prise du médicament, cette musicien présentait encore des crises d’angoisse, de panique, des cauchemars, de la fatigue et des épisodes de dépression. Les mouvements involontaires ont progressivement diminué en fréquence et en intensité.
Après un suivi médical de 13 mois, la musicienne était optimiste en ce qui concernait une reprise complète ; persistait seulement une certaine lassitude mentale ; elle dormait bien et ne ressentait que rarement des contractions involontaires infimes dans tout le corps.

Le métoclopramide est un traitement classique des états nauséeux, du mal de transport. C’est un neuroleptique anti-émétique couramment utilisé. C’est un antagoniste de la dopamine. Il prévient les vomissements par blocage des sites dopaminergiques. Il augmente l'amplitude des ondes de contractions œsophagiennes, le tonus du sphincter inférieur de l'œsophage, la vitesse de vidange gastrique. Il normalise le péristaltisme gastroduodénal et augmente le péristaltisme du grêle. 

Ce cas clinique présente les effets indésirables de la métoclopramide chez une musicienne, médicaments prescrits sur une courte durée avec des doses faibles, pour le mal de mer. Ces effets indésirables se traduisaient par des vertiges, une anxiété et des mouvements involontaires. Ces manifestations ont été présentes durant 10 mois après la prise du traitement.

A ce stade et concernant le traitement du mal de transport et d’états nauséeux banals, le métoclopramide devrait être réservé aux situations sérieuses et administré seulement après que d’autres thérapeutiques ont été essayées et jugées inefficaces.

Le métoclopramide (le primpéran) peut provoquer des symptômes extrapyramidaux périphériques et des dyskinésies tardives parfois irréversibles. Les risques sont accrus lors de l’utilisation de doses élevées ou pendant un traitement de longue durée. En particulier pour les symptômes extrapyramidaux, le risque est plus élevé chez les enfants que chez les adultes.
Lecomité des médicaments à usage humain (CHMP) de l'Agence Européenne du Médicament (EMA) recommande que le métoclopramide ne soit plus prescrit au-delà de 5 jours chez les enfants comme chez les adultes, qu'il ne soit plus utilisé chez les enfants de moins d'un an, une mesure déjà appliquée en France depuis 2007 et chez les enfants, au-delà d'un an, qu’il ne soit plus utilisé qu'en seconde intention en prévention des nausées et des vomissements après une chimiothérapie ou en post-opératoire.

Chez les adultes, il reste autorisé en prévention et en traitement des nausées et des vomissements associés à la chimiothérapie, à la radiothérapie, à la chirurgie et à la prise en charge de la migraine. Le traitement prolongé par métoclopramide peut entraîner des dyskinésies tardives, potentiellement irréversibles, en particulier chez le sujet âgé. La durée de traitement ne doit pas être supérieure à 3 mois en raison du risque de dyskinésie. En cas d'apparition de signes cliniques de dyskinésie tardive, le traitement doit être arrêté.

Rédacteur. Docteur Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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Bibliographie

Eilif Dahl, Arthur L. Diskin. Long-lasting adverse effects after short-term low-dose treatment with metoclopramide for vomiting. International Maritime Health 2014;65(1):16-19.

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