Cris

Sons poussés avec efforts ; on voit les acteurs, surtout dans le drame ou dans la tragédie, criant à tort et à travers, s’abandonner à une fougue ridicule, espèces de convulsions, que bien des gens prennent pour du feu et des entrailles. Ce qu’il y a de singulier, et en même temps de malheureux pour ces acteurs, c’est qu’ils se trouvent d’autant plus autorisés à ces sortes d’écarts, qu’ils ne sont jamais plus applaudis par le public sans goût que dans leur véhémence excessive, et dans leur extinction de voix ; c’est-à-dire lorsqu’ils n’en peuvent plus et qu’ils sont prêts à rendre l’âme ; si bien qu’en continuant à s’égosiller de la sorte, ils ne peuvent manquer de devenir tout à fait détestables, et peut-être poitrinaires, ce qui est encore pis. On ne doit s’attacher qu’à faire parler la nature, et non à la faire crier. Certains acteurs sont si maladroits sur cela, qu’ayant seulement une tirade de dix vers à débiter avec un peu de véhémence, ils y en mettent tant et d’une manière si outrée dès le commencement, qu’il leur reste toujours les deux ou trois derniers vers de trop, auxquels leur organe semble ne pouvoir plus fournir, faute d’avoir su ménager leurs forces jusqu’à la fin. C’est principalement dans une sortie qu’un acteur tragique se signale et se fait un mérite de faire beaucoup de tapage et d’éclat ; tandis qu’un jeu noble et tranquille produirait sans doute un bien meilleur effet sur l’esprit des spectateurs. Un seul mot, prononcé avec une certaine majesté imposante, excitera quelquefois plus de terreur qu’un long discours rempli de véhémence, et quiconque a moins d’oreille que de discernement, n’applaudira jamais un acteur qui ne fait que du bruit. On ne saurait approuver un emportement que la pensée de l’auteur et la situation du personnage contredisent formellement. (Voyez Déclamation)

Encyclopédie de l'art dramatique / par C.-M.-Edmond Béquet - 1886


 

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