Convenances théâtrales

Bienséances théâtrales

Bienséances théâtrales ; certaine conformité d’action avec les lieux, le temps et les personnes ; c’est-à-dire l’exacte observation de certaines règles, qu’on ne saurait enfreindre, sans enfreindre ou négliger, sans choquer les notions les plus communes ou les moindres usages reçus dans le monde. Les convenances s’observent dans la voix, le maintien, le regard et la marche. Ordinairement il ne faut pas élever sa voix au-dessus de celle de son interlocuteur, lorsque celui-ci est placé, par son rôle, au-dessus de vous. Le maintien doit s’accorder avec la voix. Il faut aussi ménager ses regards avec prudence, suivant la qualité et l’importance de la personne à qui l’on parle, ou avec laquelle on se trouve en scène, même sans parler. Il en est de même de la marche. Les convenances théâtrales s’envisagent 1° sous le rapport du respect que le personnage se doit à lui-même ; il est relatif à son rang et au genre plus ou moins grave de la pièce ; 2° sous le rapport du respect que les personnages se doivent plus ou moins grave de la pièce, mais il a plus de détaché que le précédent.

Un valet, un artisan, un employé, etc., doit parler avec respect à son maître et à ses supérieurs, et éviter de paraître familier avec lui, à moins que l’esprit du rôle n’indique formellement le contraire. De même un homme de qualité, obligé de se travestir, devra toujours se respecter assez pour ne rien faire qui puisse dégrader le personnage caché. De même encore, en conversant avec son valet, loin de lui parler en face et comme sous le nez, il évitera même de l’approcher de trop près, et encore de le toucher d’une façon trop familière.

Autres exemples puisés dans la tragédie ; lorsque Britannicus est surpris par Néron aux pieds de Julie, si le jeune prince n’emploie pas une certaine retenue, et ne cherche pas à adoucir un peu, par le ton de voix, la dureté et la hauteur de ses réponses, et qu’il dise à César en face et avec la plus grande véhémence :
… Rome met-elle au nombre de vos droits
Tout ce qu’a de cruel l’injustice et la force,
Les emprisonnements, le rapt et le divorce ?...

Quelque droit que semblent donner à Britannicus la qualité de frère, sa position actuelle et la vérité de ces reproches, non seulement il choque la bienséance en manquant au respect dû à la personne de son souverain, tout usurpateur qu’il est, mais encore, par son ton d’arrogance et son peu de circonspection, il passe les bornes de la franchise, dément son caractère de douceur, et affaiblit même l’intérêt de son personnage, en autorisant pour ainsi dire Néron, par ce nouveau prétexte, à le faire périr à la fin de la pièce. On sait qu’une injure tire quelquefois toute sa force du ton dont elle est dite, plutôt que de l’injure même. Ce qu’on se permet de dire, en pareil cas, n’en a pas moins d’énergie, pour être mitigé par une certaine retenue dans le ton, en usage à la cour et dans un monde poli ; c’est un je ne sais quoi qu’il est malaisé de définir, mais que l’homme bien né sent toujours à merveille. De même, Agamemnon doit adoucir, par le ton de voix, son ordre à Clytemnestre, lorsqu’il lui dit : Madame, je le veux, et je vous le commande.
Les actrices doivent éviter de mettre dans leur chant et dans leur jeu de l’affectation, de la lubricité, de l’indécence.

Les acteurs ne doivent pas s’ériger en critiques d’une pièce qu’ils représentent. Ils ne doivent pas rire avec le public, ou entre eux, lorsqu’ils sont en scène, des défauts d’une pièce dans laquelle ils paraissent.
C’est méconnaître leur art, c’est aussi méconnaître leur devoir envers le public, et la considération qu’ils doivent aux auteurs qui leur ont confié le succès de leurs ouvrages ; d’ailleurs, nous le répétons, jamais l’acteur ne doit oublier son personnage.
C’est encore une inconvenance très condamnable de la part des acteurs qui causent entre eux au moment où la pièce finit, ou bien qui, avant que le rideau soit entièrement baissé, s’empressent de quitter la scène. (Voyez Défauts et Représentation)

Encyclopédie de l'art dramatique / par C.-M.-Edmond Béquet - 1886


 

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