Clé du caveau

Le Caveau, on le sait, est la première société de chansonniers qui ait existé en France. Sa fondation remonte à l’année 1737, et ses premières membres furent Piron, Collé, Panard, Crébillon fils et Gallet, auxquels vinrent bientôt se joindre Favart, Crébillon père, Saurin, Moncrif, Gentil-Bernard, Fuzelier, la Bruère, Sallé et quelques autres. Depuis lors, le Caveau n’a guère interrompu ses séances, et il est toujours florissant, aujourd’hui surtout qu’il est sous la présidence d’un maître chansonnier, M. Charles Vincent, qui n’a rien à envier à ses devanciers. Il était nécessaire de rappeler ce qu’était le Caveau pour faire bien comprendre ce qu’est la Clé du Caveau, qui sert réellement à en ouvrir la porte. Les chansonniers, personne ne l’ignore, font généralement leurs chansons sur des airs connus ; quand un motif musical leur semble cadrer avec l’idée qu’ils veulent traiter, ils adoptent la coupe poétique qui doit se marier à la coupe mélodique, et s’asservissent à suivre le mètre qui leur sert de type et de modèle. Mais à mesure que les chansons se multipliaient, les airs se multipliaient aussi, soit qu’on est prît dans les opéras à succès, soit qu’on les choisit parmi les nombreuses rondes, romances, brunettes, etc., que chaque jour voyait éclore. Pour éviter une trop grande confusion, et en même temps pour faciliter aux chansonniers le choix des airs qu’ils pouvaient employer, on en vint un beau jour à publier sous ce titre : la Clé du Caveau, un répertoire général de tous les airs connus et usités à cet effet. Ce répertoire comprenait les vers d’un certain nombre de couplets écrits sur toutes les coupes poétiques imaginables, et la musique de tous les airs qu’on pouvait employer sur ces différentes coupes ; chacun de ces airs portait un timbre, c’est-à-dire une sorte d’étiquette qui devait lui servir de véhicule et le faire reconnaître, et ce timbre était soit le titre de la chanson originale, soit celui de l’opéra dont l’air était tiré, soit le premier vers du coupler qui avait servi de type. Grâce à la Clé du Caveau, les chansonniers eurent donc toutes les facilités possibles pour trouver les airs de leurs chansons. Mais ils ne furent pas les seuls à apprécier les mérites de ce répertoire ingénieux, et non seulement les auteurs dramatiques en profitèrent pour écrire les couplets de leurs vaudevilles, mais les chefs d’orchestre, surtout en province, durent considérer comme un bienfait cette aide qui leur était donnée. En effet, chaque couplet de vaudeville portant, sur la pièce imprimée, le timbre de l’air sur lequel il était écrit, le chef d’orchestre n’avait qu’à se reporter à la Clé du Caveau pour trouver sans difficulté la musique de cet air, lorsque le timbre lui était inconnu. Aujourd’hui, on ne joue plus guère de vaudeville (on y reviendra), mais on fait toujours des chansons, et la Clé du Caveau continue d’avoir de nombreux partisans.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d'Arthur Pougin, 1885.


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