Carné Marcel

Assistant de Jacques Feyder, puis de René Clair, Carné débuta avec un court métrage poétique : Nogent, eldorado du dimanche (coréalisateur : Sanvoisin, 1929) : son premier long métrage, Jenny, date de 1936 ? Marcel Carné est considéré, à juste titre, comme le maître du "réalisme poétique". De quoi s’agit-il exactement ? On sait que les années trente sont marquées, en France, par une prise de conscience des problèmes sociaux, problèmes qui, jusqu’alors, avaient été plus refoulés que résolus tant par les hommes politiques que par les intellectuels, et d’une manière générale par les "créateurs". Le cinéma, art populaire par excellence, n’avait guère été, en France, une tribune révolutionnaire ; il représentait, pour la plupart, un divertissement, et pour un petit nombre, un mode d’expression raffiné. Carné fut un des premiers à introduire des prolétaires sur l’écran, du moins à exposer leurs problèmes en termes suffisamment expressifs pour qu’ils frappent les imaginations. En fait, ses films s’inscrivent dans un grand mouvement d’art "populiste", qui apparaît aussi dans la littérature et au théâtre. Voici donc le réalisme social de Carné : les quartiers pauvres, les petits bistrots, les filles, les ouvriers dont le rêve est d’acheter une bicyclette (on disait "une bécane"), les petites vendeuses de fleurs, les copains et la java, le dimanche, dans les guinguettes au bord de la Marne. Cette imagerie d’Épinal prend un caractère étrangement poétique d !s que la caméra s’attarde sur l’intérieur d’une loge de concierge, sur les roues d’un camion, sur le béret de Michèle Morgan dans Quai des Brumes, sur le siphon d’eau de Seltz qui sépare Jean Gabin et Jules Berry discutant dans le bistrot du Jor se lève ; cette poésie devient plastique, lorsque des photographes extraordinairement habiles, comme Agostini ou Louis Page, sont derrière la caméra ; elle devient langage quand le scénariste-dialoguiste attitré de Carné, le poète Jacques Prévert, intervient à son tour. Et c’est ainsi, avec ses décors reconstitués, ses lumières et ses sujets "populistes", que Carné devint le maître d’une sorte de "Kammerspiel" français, qui fut souvent imité, mais que nul ne sut égaler. Pendant la guerre, le tandem Carné Prévert, tournant le dos au réalisme poétique, se lança dans le film poético-fantastique (Les Visiteurs du soir, 1942 ; film froid, artificiel, où l’on parle beaucoup trop), puis dans une tentative de longue haleine : les Enfants du Paradis (1943-1945), un grand film (195minutes ) qui se déroule dans un Paris romantique de 1840, un Paris imaginé par référence aux Misérables et aux Mystères de Paris. Pour certains (dont Sadoul), c’est là le chef d’oeuvre de l’équipe de Carné Prévert. Quand à nous, nous y voyons une oeuvre baroque, un peu trop inspirée, à notre avis, des films à grand spectacle comme on savait les faire à Hollywood vers 1937, et nous préférons - et de beaucoup- Le jour se lève (1939), qui est un des joyaux du cinéma français. Après guerre, Carné ne retrouva plus cette veine cinématographique : et ses oeuvres, pour bien réalisées et bien construites qu’elles fussent, ont perdu de leur efficacité (à l’exception d’un Thérèse Raquin, en 1953).


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