Amortissement

Ornement d’architecture

Terme d’architecture

AmortissementDans le langage ordinaire, on confond trop souvent le mot amortissement avec celui de couronnement. Sans doute ils ont beaucoup d’analogie, mais leur sens diffère par quelques nuances qu’il est nécessaire d’indiquer.

Suivant l’étymologie du mot, la signification du mot amortissement paraît devoir se restreindre à tout membre ou ornement d’architecture qui, s’élevant et diminuant depuis sa base, va s’amortir et mourir, pour ainsi dire, au sommet du corps qu’il termine. Il s’applique également aux parties d’un édifice qui ont pour objet d’adoucir, de corriger ce que des corps rectangulaires pourraient présenter de trop dur à l’œil. Telles sont ces gorges ou grandes scoties qui, ainsi qu’on le voit au piédestal de la colonne Trajane, servent à relier la saillie d’une corniche au socle qu’elle supporte. (Voyez la gravure qui suit, fig.1, a)

Telles sont encore les consoles ou les ornements en forme d’S dont on surmonte souvent les flancs d’un portail d’église, pour dissimuler les combles des bas côtés, et pour relier les parties latérales avec le milieu de la façade (fig. 2, b, c.)

Le mot de couronnement, au contraire, d’une signification beaucoup plus étendue, s’applique plus spécialement à tous les corps d’architecture proprement dits, qui terminent les édifices ou leurs principales parties ; tel est le chapiteau pour la colonne, la corniche pour l’entablement, et celui-ci pour le reste de l’ordonnance ; tels sont encore les attiques, les tours, les coupoles, les frontons et toutes les espèces de combles, par rapport à l’ensemble de l’édifice.

De cette double définition, il résulte que l’amortissement se distingue du couronnement, et par sa forme, et par la place qu’il occupe. En effet, l’amortissement consiste le plus souvent en ornements et ouvrages de sculpture, le couronnement en membres et corps d’architecture ; le premier est plus architectural. L’un s’applique plus particulièrement à des objets de pure décoration, l’autre à des parties essentielles et intégrantes de l’édifice. L’amortissement est nécessairement placé à la cime de l’objet dont il est le terme, l’extrémité ; le couronnement ne forme pas toujours la partie extrême de l’édifice, puisque souvent il est surmonté par l’amortissement ; quelquefois même, comme le chapiteau et l’entablement, il n’y occupe qu’une place intermédiaire. Ainsi le fronton du Panthéon de Rome, qui est le couronnement de son frontispice, est terminé par acrotère qui sans doute autrefois portait quelque figure, formant son amortissement. Ainsi la coupole qui sert de couronnement à la basilique de Saint-Pierre du Vatican, a pour amortissement une lanterne, et celle-ci un globe surmonté d’une croix.

Les amortissements tels qu’on vient de les définir, présentant le plus souvent des parties fragiles et délicates, ou des sujets qui ne s’accordaient plus avec les idées nouvelles, les monuments de l’antiquité ont dû, par cette raison, perdre promptement ceux qui les terminaient ; aussi avons-nous peu de notions sur les amortissements, sans doute très variés, qui appartenaient aux édifices dont nous voyons les restes.

Parmi ceux, en petit nombre, que le temps a respectés à Athènes, on peut citer l’acrotère qui termine le fronton d’un portique dorique connu jusqu’à présent sous le nom de portique d’Auguste, mais qui, d’après l’inscription qu’on y lit, paraît avoir été consacré à Minerve ; l’espèce de chapiteau corinthien à feuilles d’olives dont Stuart a vu un fragment sur le comble de l’édifice vulgairement appelé la Tour des Vents ; enfin l’élégant et magnifique fleuron qu’on admire encore au-dessus de la calotte qui couvre le monument de Lysicrate.
A Rome, aucun des amortissements antiques n’est resté en place, mais on ne saurait douter, d’après les médailles, qu’il n’en ait existé sur plusieurs monuments. On sait que les colonnes historiques étaient surmontées de statues, et que les colonnes milliaires étaient terminées par des globes ou des sphères de bronze ; la tradition nous apprend, en outre, que la pomme de pin en bronze, conservée dans la grande niche du jardin du Belvédère, au Vatican, servait autrefois d’amortissement au mausolée d’Adrien, aujourd’hui le château Saint-Ange. Enfin, nous savons, par le témoignage de Vitruve, que les anciens terminaient ordinairement les temples de forme circulaire par un amortissement qu’il appelle fleur ou fleuron, et dont les amortissements de la Tour des Vents et du monument de Lysicrate sont des exemples.

Les modernes ont aussi fait usage des amortissements, ils en ont même multiplié les formes à l’infini, et les ont quelquefois contournés de la manière la plus bizarre ; on doit éviter avec soin de semblables abus qui nuisent essentiellement à l’ensemble des édifices, et en altèrent le caractère sans nécessité.

Dictionnaire de l'Académie des Beaux-Arts. Tome II
Paris, Typographie de Firmin Dido Frères, Fils et Cie, 1868


 

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