Affectation

Tout ce qui approche de l’excès devient affectation.

Défaut opposé au simple et au naturel.

Chassons loin de nos yeux ces tragiques pagodes,
Qui, marchant par ressort, et toujours se guindant,
Soupirent avec art, pleurent en minaudant.

Tout ce qui approche de l’excès devient affectation.
De tous les défauts, l’affectation est celui qui peut se contracter le plus aisément ; or ce qui est outré est presque toujours froid. Il fait jouer le sentiment et non les mots. Toutes les fois qu’on parle du ciel, le regarder c’est l’affectation (à moins qu’on ne joue quelque Tartuffe) ; même que de poser continuellement la main sur son cœur en le nommant ou en parlant d’amour.
Il faut laisser aux mauvais acteurs cette puérile exactitude du geste à la chose, qui, pour exprimer la sensibilité, s’appliquent fortement la main sur la poitrine, comme si effectivement il était question du cœur physique en cette occasion. La pompe et la grande force dans l’expression sont insoutenables, surtout lorsque le sentiment est faible et le langage vulgaire ; nous ne voulons pas qu’un acteur nous étonne par ses propres idées, nous demandons qu’il rende fidèlement la pensée de l’auteur. Rien de plus insupportable que les acteurs qui veulent tout faire valoir dans un rôle ; au lieu de faire attention que les grands coups de maître au théâtre sont toujours amenés par quelques sacrifices, et qu’enfin le véritable art consiste à négliger certains détails pour appuyer davantage sur d’autres. On pourrait reprocher à nombre de danseurs et de danseuses l’affectation avec laquelle ils terminent leurs pas ; leurs dernières poses semblent vraiment dire au public : - « Voilà qui est beau, applaudissez ! » Pourquoi donc ne cherchent-ils à joindre la simplicité à la grâce, et le naturel à la noblesse ?

Encyclopédie de l' art dramatique / par C.-M.-Edmond Béquet - 1886


 

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