Yeux artificiels

L’art de fabriquer des yeux artificiels remonte assez haut. On les fit en verre d’abord, puis en émail. A la fin du dix-septième siècle, le voyageur anglais Lister raconte qu’il alla visiter l’atelier de « Hubins, le fabricant d’yeux de verre. J’en vis, dit-il, de pleins tiroirs de toutes couleurs, de façon à appareiller n’importe quels yeux ». Cet Hubins ou Hubin demeurait rue Saint-Martin, et il avait pour concurrent un sœur Le Quin, qui demeurait rue Dauphine.
Au siècle suivant, les deux émailleurs-oculistes qui se partagent les préférences du public sont les sieurs Raux et Auzou. Une réclame, sollicitée sinon payée par le premier, s’exprime ainsi : « Raux, émailleur ordinaire du roi, rue des Juifs, un des plus habiles et des plus célèbres de cette capitale pour les yeux artificiels d’émail, en tient une collection précieuse de toutes espèces.
Cet ingénieux artiste est parvenu au point d’imiter tellement la nature par la forme, la couleur et le brillant, que lorsque l’œil éteint n’est pas entièrement détruit ou déformé, celui qui le remplace, reçoit tous les mouvements du muscle, et ne permet plus de distinguer lequel des deux est affecté.
Sa générosité, et son amour pour le bien de l’humanité, le portent même à en donner gratuitement les lundis aux pauvres ».
Raux mourut en 1777. Il eut pour successeur Auzou le susnommé, qui fut également émailleur du roi. « On ne saurait dit un journal du temps, trop faire connaître le talent ingénieux avec lequel cet artiste se rapproche si près de la nature que l’art semble disparaître dès que l’œil artificiel est mis en place. On les voit tous les deux suivre la même direction et faire ensemble les mêmes mouvements ».
Dès la fin du dix-septième siècle, on distribuait sur le Pont-Neuf les prospectus d’industriels qui se vantaient, dit Marana, de fabriquer des yeux en cristal, de guérir les maux incurables, de rajeunir les vieillards et de « faire des jambes de bois pour réparer la violence des bombes ».
Cette industrie et d’autres analogues se développèrent singulièrement par la suite. L. Prudhomme écrivait en 1807 : « Si vous voulez savoir jusqu’où l’art est parvenu dans cette métropole, allez chez M. Hazard ; au foyer de sa lampe, vous verrez naître le cristallin, l’uvée, l’iris, les veines les plus imperceptibles, et pour ainsi dire jusqu’au mécanisme admirable de la vision. A midi, vous lui demandez l’œil qui vous manque, et après le dîner, vous allez en société avec des yeux semblables ».
Avez-vous besoin de prunelles ? le sieur Demours vous en fera une. De dents ? voyez Sirabode ou Catalan… »
Dictionnaire historique des arts, métiers et professions. Exercés depuis le 13 siècle. Alfred Franklin, E. Welter éditeur, 1906


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