Rat d’Opéra

Edgar Degas, Le Foyer de la danse à l'Opéra de la rue Pelletier (1872)

Le rat est une variété de l’espèce rongeuse, absolument spéciale à l’Opéra de Paris. Elle a été souvent dépeinte, mais mal définie, par les naturalistes qui s’en sont occupés. On peut tenir pour ressemblant le portrait qu’en a tracé un homme qui s’y connaissait, Nestor Roqueplan, dans ses Nouvelles à la main (décembre 1841) : Nous dirons que le rat a toujours été mal connu et mal défini. Certaines gens du dehors appellent rats de grands êtres qui n’ont rien de l’exiguïté et de l’inconsistance de ce petit animal, et il y a des jeunes gens de famille qui ne désabusent pas leurs parents quand ceux-ci, en parlant de grosses diablesses de trente ans, leur reprochent leur rat de l’Opéra. Le vrai rat, en bon langage, est une petite fille de sept à quatorze ans, élève de la danse, qui porte des souliers usés par d’autres, des châles déteints, des chapeaux de couleur de suie qui sentent la fumée de quinquet, a du pain dans ses poches et demande dix sous pour acheter des bonbons. Le rat fait des trous aux décorations pour voir le spectacle, court au grand galop derrière les toiles de fond, et joue aux quatre coins dans les corridors ; il est censé gagner vingt sous par soirée, mais au moyen des amendes énormes qu’il encourt par ses désordres, il ne touche par mois que huit à dix francs et trente coups de pied de sa mère. Le rat reste rat jusqu’à l’époque où il prend un autre nom, qu’il est hors de propose de dire, jusqu’à l’âge où il ne demande plus de bonbons et reçoit des bouquets.
Le rat appartient exclusivement à la danse ; le chant n’en produit pas.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885


 

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