Proverbe

« On sait, disait un critique du dix-huitième siècle, que les proverbes dramatiques sont des espèces de petites comédies fort en usage aujourd’hui dans les sociétés à Paris et à la campagne. On prend un proverbe, sur lequel on arrange une action et quelques scènes qui servent à la développer. Ces bagatelles in-promptu amusent beaucoup les acteurs, ainsi que la société qui les écoute, et qui est convenue de n’être pas difficile. Tout le monde n’a pas le degré d’imagination nécessaire pour arranger ces petits drames, ni la gaieté dont ils ont besoin. M. de Carmontelle a fait les siens pour en épargner la peine à ceux qui voudront se procurer cet amusement. Ils pourront choisir ; il a mis des titres particuliers à la tête de chaque drame ; et le proverbe n’est qu’à la fin, pour laisser au lecteur la satisfaction de le deviner, comme en énigme. » Carmontelle est en effet l’inventeur, en France, de ce genre de petites pièces légères. Il aimait à jouer la comédie en société, ce qui était une rage au dix-huitième siècle, et c’est pour satisfaire ce goût général, partagé par lui, qu’il écrivit plus de cent petits proverbes scéniques, dont le succès fut considérable. Un demi-siècle plus tard, un jeune homme de bonne famille, Théodore Leclercq, mû par le même sentiment que Carmontelle, c’est-à-dire le goût de jouer la comédie de société, employa le même moyen que lui pour le satisfaire, et, sans plus de prétention, écrivit de nombreux proverbes, qui furent publiés en suite et dont on fit plusieurs éditions. Lui-même disait, dans la préface du premier de ces recueils : « J’ai aimé à jouer des proverbes, et j’en ai fait. C’est toujours une nécessité d’en faire quand on aime à en jouer. » Les proverbes de Théodore Leclercq obtinrent aussi beaucoup de succès. Mais, plus récemment, un grand poète, un grand écrivain, a publié sous ce titre : Spectacle dans un fauteuil, un recueil de comédies et de proverbes, qui, bien que dans sa pensée ils ne fussent pas destinés au théâtre, furent bientôt transportés sur la scène, où leur triomphe fut éclatant. On connaît ces petits chefs-d’œuvre, qu’Alfred de Musset avait écrits comme en se jouant, et qui sont l’une des gloires du théâtre moderne : Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée. On ne badine pas avec l’amour. Il ne faut jurer de rien, etc. Musset a donné certainement au proverbe dramatique sa forme la plus littéraire et la plus charmante. Auprès de lui il faut signaler quelques-uns des jolis proverbes, un peu précieux, mais pleins de grâce, de M. Octave Feuillet.
Dans un ballet de Benserade, le Ballet des Proverbes dansé par Louis XIV en 1654, plusieurs proverbes étaient mis en action, et la scène changeait à chaque proverbe nouveau.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885


 

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