Perspective

Peinture

Nom féminin
La perspective est le changement de forme et de dimension qu’éprouve à nos yeux l’apparence des objets, suivant qu’ils sont plus ou moins éloignés, ou que nous les considérons de différents points de vue, ce qui résulte, d’une part, de la variété de l’angle que forment dans notre œil les rayons de la lumière réfléchie par l’objet visible, suivant l’éloignement et la position dans lesquels nous nous plaçons relativement à cet objet ; et, d’autre part, de l’affaiblissement et de la confusion de cette apparence, occasionnée par l’interposition d’une plus ou moins grande étendue d’atmosphère plus ou moins chargée de vapeurs. De là, la distinction que l’on fait, dans le langage comme dans la pratique de l’art, de deux sortes de perspectives ; la perspective linéaire, dont le système s’établit positivement et se démontre méthodiquement au moyen de lignes géométriques, et la perspective aérienne qui est l’effet vague et indéterminé des phénomènes de l’atmosphère. La première de ces deux sortes de perspectives est l’objet d’une science que l’on désigne elle-même sous le nom de perspective, la perspective, et qui est un rameau de cette branche des mathématiques que l’on appelle l’optique. La science de la perspective déterminée à quel point doit être placée, et dans quelles lignes doit être circonscrite sur la toile, l’image des figures ou des objets diversement situés dans l’espace, pour que cette image les représente à nos yeux tels que ceux-ci les apercevraient dans cet espace. Cette science est positive, et ne saurait tromper celui qui en fait une application exacte : soient données la distance et la forme d’un corps connu, la géométrie déterminera avec certitude quelle est la hauteur et quelles dimensions il faut lui assigner sur la toile, pour qu’il y paraisse de même grandeur et de même forme que dans la nature.
Quant à la perspective aérienne, elle n’est pas susceptible de démonstration ; il n’y a ni règle ni méthode pour en déterminer les effets. Seulement, on a l’expérience que plus objet est éloigné, plus les contours sont vagues et perdus, et la couleur confuse et atténuée ; qu’à distance égale ces effets sont beaucoup plus marqués dans une atmosphère épaisse et chargée de vapeurs, que sous un ciel pur et lumineux, et qu’il est tel phénomène de l’air qui peut en un instant tout changer, et entraîner le spectateur dans les plus étranges illusions. C’est à l’œil exercé, et en quelque sorte au sentiment du peintre, à décider du reste ; lui seul peut aviser aux moyens de bien rendre ce qu’il voit.
La perspective aérienne est, comme l’autre, indispensable pour compléter la représentation des objets dont l’aspect est modifié par leur éloignement de l’œil du spectateur. Toutefois, les effets de cette sorte de perspective ne commencent à devenir sensibles que sur les objets placés à une certaine distance, tandis que la perspective linéaire agit sur les plus rapprochés comme sur ceux qui le sont le moins. Les raccourcis, si ordinaires dans la composition des figures de premier plan, sont un effet de perspective linaire.
On est dans le doute si les peintres de l’antiquité eurent la science de la perspective. Quelques peintures, quelques bas-reliefs antiques, dans lesquels on remarque antiques dans lesquels on remarque des effets de perspective, ne sont pas, sur cela, un témoignage affirmatif suffisant. Le seul instinct d’imitation a pu suffire pour reproduire ces effets. Même, de nos jours, beaucoup de peintres ne savent pas la perspective, et, par habitude, à vue d’œil, établissent assez bien les divers plans de leurs tableaux, et assignent assez exactement à chaque objet la place qu’il doit occuper et les dimensions qu’il doit avoir sur la toile ; ceux à qui cette science manque le moins souvent n’ont pas recours à ses procédés mécaniques, et opèrent aussi à vue d’œil. Toutefois, ces derniers ont sur les autres un grand avantage. Chez eux, le coup d’œil étant secondé de la prescience en quelque sorte de l’objet, ils en ont une perception beaucoup plus nette, et leur main, pour le tracer, est plus libre et plus sûre ; de même que la science du système musculaire est d’un grand secours au dessinateur pour rendre les formes et le mouvement d’une figure, alors même qu’il opère, le modèle sous les yeux. Par cette raison, l’étude spéciale de la perspective est du nombre de celles qui forment le peintre accompli.
Mettre un tableau en perspective, c’est tracer sur la toile, par les procédés de la géométrie, les lignes qui doivent régler la grandeur et la place de chaque objet. Ce soin est surtout indispensable lorsqu’il s’agit d’objets sur lesquels les effets de la perspective sont très sensibles et très précis, comme dans les fabriques d’architecture régulière, et ce qu’on appelle les intérieurs. En ce cas, le peintre qui ne sait pas la perspective à recours à un géomètre de profession. Celui qui la sait le mieux en use souvent de même, pour s’éviter l’ennui d’une opération minutieuse, laquelle exige, outre le savoir, une certaine habitude d’opérer.
On distingue sous le nom de perspective, les peintures qui ont pour objet principal les effets de la perspective et ses illusions, dans les sujets où elles sont le plus frappantes, comme de longues galeries, des portiques à grand nombre d’arcades ou de colonnes, des allées d’arbres à perte de vue, etc. On emploie d’ordinaire ces sortes de peintures pour masquer les murs trop rapprochés d’un jardin ou d’une cour, et pour faire ce qu’on appelle au théâtre, des toiles de fond. On appelle vue perspective, par opposition à vue géométrale, la vue d’un édifice, où sont rendus les effets de la perspective.
Edouard Rouveyre. Comment apprécier les croquis, esquisses, études, dessins, tableaux, aquarelles, pastels, miniatures. Librairie G. Baranger fils, 1911


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