Paroles

s. f. plur.
C’est le nom qu’on donne au poème que le compositeur met en musique, soit que ce poème soit petit ou grand, soit que ce soit un drame ou une chanson. La mode est de dire d’un nouvel opéra que la musique en est passable ou bonne, mais que les paroles en sont détestables : on pourrait dire le contraire des vieux opéras de Lulli.
Dictionnaire de musique, Jean-Jacques Rousseau, 1767

 

Pour désigner le poème, le livret d’un opéra, on dit parfois « les paroles », ce qui est un tort, car les deux choses sont distinctes, bien que leur réunion forme un tout complet. Ce qui le prouve bien, c’est qu’on peut faire un bon livret avec des vers exécrables, tandis qu’avec de fort méchants livrets, ce qui est beaucoup plus fâcheux. Scribe nous a donné de nombreux exemples du premier cas, tandis que nos librettistes actuels usent surtout de la seconde manière. Pour moi, je préfère Scribe, par cette simple raison qu’une action forte et émouvante, vraiment dramatique, inspire bien plus le musicien et intéresse bien autrement le spectateur que des vers très harmonieux dont la beauté masque un complète indigence scénique. Ce n’est pas à dire qu’on doive faire litière des paroles, qui d’ailleurs, bonnes ou mauvaises, doivent donner au spectateur la compréhension de l’action dramatique. Rameau, cependant, faisait profession de les mépriser souverainement, et il en donna la preuve un jour, à propos de son opéra les Paladins, dont le parolier est resté anonyme. Une des cantatrices traînant un peu trop le mouvement d’un morceau : « Allez plus vite, Mademoiselle, allez plus vite, lui dit-il. Mais, réplique l’artiste, on n’entendra plus les paroles ! reprend le compositeur. Il suffit qu’on entende ma musique. » Une anecdote du même genre se rapporte à la Serre, auteur du poème de Pyrame et Thisbé, opéra dont la musique avait été écrite par Rebel et Francoeur (1726). La chanteuse chargée de l’énergie désirables, mais elle articulait mollement. La Serre s’en plaignait, et demanda qu’on la fît remplacer par Mlle Le Maure, avec laquelle, disait-il, on entendrait du moins les paroles. « Y pensez-vous ? lui répliqua-t-on. Ce serait bien là, en vérité, le plus mauvais service que l’on pût vous rendre ! « On ne dit pas ce répondit le poète.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885


 

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