La médecine du temps de Mozart. La thérapeutique. Dossier 4

Purgatifs, vomitifs, diurériques, fébrifuges

Les Principales classes thérapeutiques

Purgatifs
Encore appelés « laxatifs », ils agissent « sur les matières de l’estomac et des intestins en les rendant plus fluides et plus- propres à obéir au mouvement vermiculaire de leurs tuniques musculeuses ». Sur l’estomac, ils agissent « en irritant la membrane nerveuse, en provoquant un flux d’esprits plus grands… ». Largement employés, ils sont cependant contre-indiqués dans les hémorragies, le redoublement d’une fièvre continue, la grossesse.
On les utilise en particulier dans les maladies fébriles, où ils sont doués d’une action locale et générale, ainsi que dans les phlegmasies (inflammation) muqueuses et séreuses, enfin dans les hémorragies actives et certaines affections spasmodiques.
Les remèdes purgatifs les plus employés, appartenant au règne végétal, sont la manne, les pruneaux, le miel, le tamarin, les huiles, le lait de vache et de chèvre, la rhubarbe , le séné, etc.

Vomitifs
Egalement nommés « émétiques », ils sont indiqués dans les maladies qui reviennent par périodes, telles que l’épilepsie, la fièvre continue, la fièvre intermittente (surtout « quarte »), les « étourdissements », la petite vérole avant l’éruption des boutons, l’angine, la coqueluche, les catarrhes pulmonaires chroniques, la phtisie pulmonaire, la diarrhée et la dysenterie, les maladies dites « contagieuses ».
Ils sont contre-indiqués en cas de :

  • anévrisme cardiaque ou vasculaire
  • « débilité générale considérable » (sauf cas urgents)
  • difficultés pour le malade de vomir
  • altération de l’état général
  • problème pulmonaire
  • toux, pleurésie, pneumonie
  • hernie
  • inflammation des yeux
  • fièvre ardente
  • ainsi que chez les femmes sujettes aux hémorragies, les femmes enceintes, les nouvelles accouchées et pendant les règles.

Certaines précautions doivent être prises, en fonction de l’âge, des forces et du tempérament. De même, chez les personnes « grasses », la dose doit être augmentée. Avant l’utilisation des émétiques, on doit suivre une diète particulière et boire des tisanes « adoucissantes ». Leur administration se faisait soit par voie gastrique, soit par lavements. Citons, entre autre : le tartrate de potasse ( ou tartre émétique), l’antimoine, l’ipécacuanha, la violette, également employée comme sudorifique :
Wolfgang est resté au lit jusqu’à midi, car il avait attrapé un léger rhume du fait de la pluie et du vent fort qui nous avait accompagnés pendant la traversée des montagnes. Je lui ai fait prendre du thé et du sirop de violette, et l’ai laissé transpirer. » [4]

Diurétiques
Ils sont utilisés lors des fièvres aiguës et adynamiques , des phlegmasies essentielles, péripneumonie, pleurésies, gonorrhée, rhumatisme, goutte, hydropisie, maladie des voies urinaires, etc. On distingue plusieurs classes de diurétiques, selon leur mode d’action :

  • les émollients (bardane, guimauve…)
  • les acides (citron, orange…)
  • les excitants
  • les diffusibles ( vin blanc, alcool, éther…)
  • les toniques

Fébrifuges (ou « diaphorétiques »)
Les diaphorétiques augmentent l’exhalation de la peau. Les remèdes les plus employés sont :

  • le quinquina, sous forme de poudre, encore appelé « poudre de la Comtesse », « remède des anglais » ou « poudre des jésuites ».
  • l’Ipécacuanha
  • la graine de talitron
  • la guimauve    
  • la joubarbe
  • le séné    
  • la rhubarbe    
  • la gentiane    
  • le sel de tamarin
  • le sureau, fréquemment employé par la famille Mozart :
    « Ce n’est que maintenant que je ressens les effets du froid pendant le voyage. Dimanche soir, j’ai déjà bu de l’infusion de sureau avant l’académie, et je me suis habillé chaudement ; lundi, j’ai bu à nouveau de l’infusion, dans mon lit ou je suis resté jusqu’à dix heures ; l’après-midi, à nouveau une infusion, et ce matin de même. [4]

Antalgiques
Le traitement de la douleur, au sens large du terme, fait appel à différentes classes thérapeutiques et différents remèdes. La saignée est utilisée à visée antalgique dans les « fièvres inflammatoires » et les « phlegmasies aiguës ». Les vomitifs sont indiqués dans les céphalalgies. Les antispasmodiques trouvent leur place s’il existe une trop grande excitation nerveuse, ou bien un excès de contractilité musculaire. Ils agissent alors soit en « engourdissant le système nerveux » (pivoine…), soit en provoquant une sorte d’état d’ivresse (opium), soit en réveillant les fibres neuromusculaires (c’est le cas des huiles essentielles). Le quinquina, surtout utilisé comme fébrifuge, a aussi des propriétés antalgiques. On fait également appel à des méthodes telles que les bains, les vésicatoires, les cautères, les cataplasmes, lotions…

Autres classes de traitement

Les astringents ont pour effet d’arrêter les « évacuations morbifiques, sanguines ou humorales ».
Les calmants « modèrent l’activité trop grande des solides » (cf. la liqueur minérale d’Hoffmann)
Les antiémétiques doivent combattre les excès des émétiques (décoction de quinquina, acide carbonique…).
Les « antiphlogistiques », autrement dits « anti-inflammatoires », sont représentés par de nombreux remèdes sous forme de boissons aqueuses, mucilagineuses ou acidulées. On utilise aussi le petit lait, l’eau de veau et de poulet, certains émollients.
La saignée est également appréciée pour son action anti-inflammatoire, ainsi que les bains, les « diètes antiphlogistiques », etc.
Les antiseptiques, « contre la dissolution putride des corps », agissent soit en combattant l’humidité chaude, soit grâce à leur pouvoir oxydant (utilisé dans les fièvres adynamiques et ataxiques), soit en « consolidant les parties » quinquina, gentiane…).
Les antispasmodiques sont divisés en deux classes, en fonction des causes des spasmes.
On distingue ceux qui diminuent l’excitabilité nerveuse (les sédatifs, calmants…) , des stimulants ( dont le quinquina).

Les remèdes [7]

En pathologie cardiaque, la scille est proposée par Sénac comme diurétique. La digitale pourprée donnée en infusion, était considérée comme diurétique. Cullen le premier remarque qu’elle ralentit les mouvements du coeur. Withering fait la même remarque et la donne dans l’hydropisie parce qu’il la considère comme diurétique.
La bardane a des propriétés diurétiques et sudorifiques. On l’utilise dans la goutte, les rhumatismes, les maladies cutanées chroniques, ulcères et plaies, les fièvres continues, les gonflements articulaires, etc.
La rhubarbe fut introduite en Europe au 17ème siècle. On lui attribuait les propriétés de « fortifier l’estomac, de purger doucement la bile, principalement lorsqu’elle est aidée de quelque purgatif ».
Commerçants et botanistes ramènent de leurs voyages lointains des plantes jusqu’ici méconnues, dont ils vont développer les vertus curatives. C’est le cas de la racine de colombo, du colchique recommandée dans le traitement de la goutte, et de l’opium, développé par Sydenham.
De même, Le quinquina, qui provient de la résine d’un arbre d’Amérique du Sud, est connu depuis longtemps des Indiens. Introduit en Europe en 1640, ses mérites en tant que fébrifuge puissant, mais aussi comme anticatarrheux, antisyphilitique et anti-eczémateux s’imposèrent rapidement en Europe. Il fut aussi utilisé comme anti-dysentérique et émétique.
L’ipecacuanha, importé d’Amérique centrale en 1572,- fut tout d’abord employé dans les dysenteries. Ses racines possèdent des propriétés vomitives. Il est également anti-hémorragique, fébrifuge, anti-vermineux, « anticontagieux », agit contre les engorgements visqueux et « augmente la contractilité des membranes muqueuses des organes », mais est toxique à forte dose.
Le guaiac est issu d’un arbre d’Amérique Centrale. Il stimule les tissus organiques, provoque une action vive sur la peau. On s’en sert pour le traitement de la syphilis ( en association avec le mercure dont il diminue les effets secondaires), dans la goutte et le rhumatisme chronique, dans les maladies cutanées.
L’efficacité de ces nouvelles plantes sera démontrée réellement lorsque les chimistes apprendront, plus tard, à extraire leur principe actif. Mais déjà, leur emploi de plus en plus répandu rivalise avec les traditionnelles médications déplétives ou évacuatrices. La chimie commence à. prendre de l’essor, et on s’intéresse également de près aux remèdes à base de dérivés métalliques, subodorant un rapport étroit entre l’action des remèdes et leur composition chimique.
L’arsenic est utilisé sous différentes formes, qui peuvent parfois, si l’on n’en fait bon usage, devenir toxique ( c’est le cas de l’acide arsénieux ou « aqua toffana, connu pour être un poison utilisé depuis l’antiquité). Il est utilisé dans les fièvres intermittentes, et comme topique dans les maladies de peau ,etc.
L’antimoine est un métal à base d’arsenic. Selon sa forme chimique il est connu pour être émétique ( tartre stibié), expectorant ( kermès), diaphorétique et stimulant ( teinture d’antimoine).
Le mercure (ou « calomel »), traitement de la syphilis par excellence, fait l’objet de nombreuses préparations : pilules, sirop, « onguent mercuriel » couramment utilisé sous forme de vapeurs, frictions, sels mercuriels (représentés entre autre par le fameux « sublimé corrosif » de Van Swieten). Très répandu au 18ème siècle, on découvre néanmoins peu à. peu sa haute toxicité neurologique, qui va en limiter l’utilisation.
En dermatologie, l’oxyde de zinc, l’acétate de plomb, l’huile d’asphalte sont les remèdes de choix.

Rédactrice Médecine des arts Martine Gwenaelle
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Bibliographie

[1] Dousset J. C. Histoire des médicaments des origines à nos jours. Ed. Payot, 1985, 405 pp.
[2] Baumé A. Eléments de pharmacie théorique et pratique. Paris, Samson, 1784, 883 pp.
[3] Ribon P. Guérisseurs et remèdes populaires dans la France ancienne. Ed. Horvath. 1983, 169 p.
[4] Mozart W.A. Correspondance, tome I à VI. Edition de la Fondation Internationale Mozarteum Salzbourg, réunie et annotée par W. A. Bauer, O.E. Deutsch et J.H. Eibl. Edition Française et traduction de l’allemand par Geneviève Geffray.
[5] Nysten P. H. Dictionnaire de médecine et des sciences accessoires à la médecine avec l’étymologie de chaque terme. Ed. Paris-Brosson, 1814, 692 p.
[6] Meunier L. Histoire de la médecine depuis ses origines jusqu’à nos jours. Librairie. Baillère et Fils, 1911, 637 p.
[7] Chast F. Histoire contemporaine des médicaments. Paris Edition La découverte, 1995, 388 p.

 


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