Heure (L’) du spectacle

L'Heure du spectacle

Il est certain que l’heure du spectacle a considérablement varié depuis qu’il existe des théâtres à Paris. C’est dans le jour autrefois qu’avaient lieu les représentations, et Beauchamps nous l’apprend en ces termes : « Il paraît, par l’ordonnance de police du 15 novembre 1609, que l’obscurité des rues ne devait pas nuire au concours du peuple, puisqu’elle porte que les comédiens des deux théâtres (Le Marais et l’Hôtel de Bourgogne) ouvriront leur porte à une heure, et qu’avec telles personnes qu’il y aura, ils commenceront à deux heures précises pour que le jeu soit fini avant quatre heures et demi (sic), et ce règlement avait lieu depuis la Saint-Martin jusqu’au quinze février. » Plus tard, l’heure du spectacle fut reculée, et de retard en retard on finit par la mettre, comme nous la voyons aujourd’hui, fort avant dans la soirée. « En 1670, dit M. Jules Bonnassies, on commençait à trois heures, d’après un roman de Borsault, et l’on finissait à sept ; de ce que dit Grimarest, on peut néanmoins conclure les représentations avaient lieu de quatre à neuf heures.
On jouait toujours aux chandelles. A l’assemblée du 15 janvier 1685, on décida que ceux qui ne seraient pas prêts à commencer à cinq heures et quart à la pendule du théâtre payeraient une amende de trente sols. Le 18 avril 1746, on arrêta qu’on commencerait à cinq heures et quart depuis l’ouverture jusqu’au 1er octobre, à cinq heures et demie pendant le reste de l’année, à peine de trente sols d’amende aux manquants. En 1776 l’heure était portée invariablement à cinq heures et demie, et, le 14 mai, il fut statué que ceux qui la feraient reculer par leur faute payeraient 24 livres d’amende. » On voit que jusque-là l’heure était fixée d’une façon invariable. Ce n’est que plus tard, et, je pense, vers l’époque de la Révolution, qu’elle commença à être moins absolument uniforme et à se modeler sur le plus ou moins de longueur des spectacles. Toutefois, elle restait toujours à peu près dans les mêmes limites, de façon que les représentations prissent fin vers neuf heures ou neuf heures et demie, et que le souper de famille, ce souper de nos pères, si gai et si réjouissant, n’en fût pas atteint (Il est certain qu’à l’époque de la Révolution les spectacles finissaient tous aux environs de neuf heures. Les preuves abondent à cet égard, et entre autres en voici une que nous donne le Journal de Paris du 16 décembre 1792, en annonçant des jeux de fantasmagorie et des apparitions de spectres qu’offrait au public, à l’hôtel de Chartres, rue Richelieu, un certain Paul Filidort : « Il répètera ces évocations deux fois par jour ; ma première à 5 heures et demie, et la deuxième à 9 heures, à la sortie des spectacles). Cependant peu à peu les habitudes se modifièrent, au point de vue du spectacle, comme les mœurs et les coutumes générales se modifiaient elles-mêmes : les affaires prenant chaque jour plus d’extension, la journée de travail se prolongeant sans cesse, l’heure du dîner se trouvant reculée d’une heure environ à chaque période de dix à quinze ans, si bien que nous dinons aujourd’hui à sept ou huit heures, tandis qu’il y a un demi-siècle nos pères dinaient à quatre heures, les théâtres durent conformer leurs usages à ceux du public et retarder de plus en plus le moment où ils commençaient leurs spectacles. Il y a une quarantaine d’années, les représentations théâtrales commençaient entre cinq heures et demie et six heures et demie ; vingt ans plus tard, elles étaient déjà reculées, et ne commençaient guère que de six heures et demie à sept heures et demie ; aujourd’hui enfin, on ne va pas au spectacle avant huit ou neuf heures. A moins d’un changement complet dans les mœurs, ou ne peut guère attendre de nouvelles modifications, car, les théâtres fermant leurs portes à minuit, la durée du spectacle se trouve aujourd’hui réduite à ses dernières limites, et il n’est pas probable qu’on la puisse accourcir davantage.
Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d’Arthur Pougin, 1885


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