Hernie chez un instrumentiste à vent

Pensez-vous que la trompette puisse être à l’origine de cette hernie ?

Question 1

Pensez-vous que la trompette puisse être à l’origine de cette hernie ?


Réponse

A la première question sur la relation causale de la pratique de trompette et de la hernie, je resterai prudent sur le facteur causal, mais par contre il est vraisemblable que la pratique de cet instrument dans certaines conditions soit un facteur favorisant. Les hernies des « souffleurs et instrumentistes à vent » ont été décrites depuis fort longtemps sur le plan médical, puisque le médecin Ramazzini au XVII° siècle avait déjà évoqué ce risque et cela a été repris dans de nombreuses publications citant que « toutes les activités qui augmentent la pression intra-abdominale peuvent aggraver une hernie, ou/et la favoriser : "les efforts de soulèvement de poids, de toux, de défécation, mais aussi la pratique d’instrument à vent". Il est à noter que la plupart des études sur ce problème font plus volontiers référence aux hernies inguinales et pas aux hernies de la ligne blanche qui sont moins fréquentes. Evidemment les paramètres biomécaniques de la paroi diffèrent. Des composantes individuelles hors pratique instrumentale peuvent intervenir, notamment l’obésité.
Ces hernies sont sensibilisées par la manœuvre de Valsalva, c’est même un moyen de mettre en évidence la hernie. On se doit de rappeler que la manœuvre de Valsalva intervient lors du jeu des instruments à vent.
(Expirer vigoureusement contre une glotte fermée, cette manœuvre est appelé manœuvre de Valsalva. Elle est utilisée pour jouer d’un instrument à vent et a pour effet d’augmenter la pression intra-abdominale qui peut effectivement favoriser une hernie.)
En pratique les affections de type herniaire ne sont pas reconnues comme maladie professionnelle, mais elles peuvent très bien si la hernie se manifeste de manière subite lors de la pratique être déclarée comme accident de travail, à charge à la sécurité sociale de le reconnaître ou pas en tant que tel.

Question 2 et 3

 - Peut-être ai-je tendance à trop "appuyer" pour sortir les aigus ?
  - Peut-être ai-je une mauvaise gestion/habitude du souffle ?


Réponse

A la question 2 et 3 vous vous interrogez sur le rôle de la technique de jeu, est-ce que j’ai tendance à trop appuyer pour sortir les aigus, ai-je une mauvaise gestion du souffle ?
Vous avez raison de vous poser ces questions, la technique de jeu à un rôle sur la pression intra-orale et intra-abdominale, cela a été testé d’ailleurs chez des musiciens peu expérimentés par rapport à des musiciens plus expérimentés. Les moins expérimentés présentaient des pressions supérieures. Cela signifie que l’on peut certainement optimiser le geste aéropharyngé, les pressions exercées. Je pense que le meilleur conseil que je pourrais vous donner en l’occurrence, c’est de travailler cela avec un kinésithérapeute expérimenté pour les musiciens, et plus encore les instruments à vent. Il en va de même pour la gestion du souffle

Question 4

En cas d’opération, sera-t-il possible de reprendre la trompette, et faudra-t-il prendre des précautions particulières ?


Réponse

En première intention, je pense que la question 4 pourrait être posée au chirurgien qui va poser l’indication de l’intervention chirurgicale. Ils ont l’habitude d’avoir des patients divers, dont certains travaillent dans des pratiques certes différentes mais « en force » au niveau de la sangle abdominale et parfois avec des efforts en « apnée » avec donc des pressions intra-abdominales élevées. Je pense que de toute manière son avis est important. La reprise dépend de l’importance de la hernie, mais aussi de la nature de l’intervention.
Sur un plan général, il existe peu d’articles scientifiques sur le sujet de la reprise de l’activité, quel que soit le métier et la pratique exercée. Il s’agit pourtant d’un sujet important sur plusieurs plans. Sur le plan médico-légal : C’est fixer une date de reprise du travail, mais plus encore pour un musicien, le rythme de préparation antérieur à la reprise pour pouvoir tenir son poste de musicien, en orchestre par exemple. L’enjeu est différent pour un professeur de musique, mais la question se pose néanmoins.
Les résultats des études dans un domaine général, pour les travailleurs qui font des efforts sont finalement relativement disparates mais globalement en faveur d’une reprise d’activité (avec les réserves liées à des problématiques individuelles). Il n’existe pas d’étude concernant les instrumentistes à vent sur ce point, mais lorsqu’on lit de nombreux témoignages d’instrumentistes à vent ayant eu une ou des hernies de la paroi, et ayant subi une chirurgie, on perçoit que cette reprise s’est réalisée sans trop de difficulté. Souvent le type de hernie n’était pas exprimé dans ces témoignages et on peut supposer qu’il s’agissait plus fréquemment d’hernie inguinale, et la question reste posée concernant les hernies de la ligne blanche. Dans ces témoignages divers, nombreux sont ceux qui indiquent avoir arrêté leur pratique pendant environ 6 semaines. Un instrumentiste à vent est avant tout un musicien et il peut se préparer en dehors même de la pratique (même si effectivement, il s’agit d’une pratique qui nécessite un entraînement très régulier).

Mais il faut de suite ajouter qu’une telle reprise doit se faire en relation étroite avec le chirurgien qui a fait l’intervention, elle doit être très progressive avec un intervalle de repos total sur le plan de toutes les activités qui risque d’augmenter fortement la pression intra-abdominale. Des facteurs divers entrent en ligne de compte, le type de hernie, la morbidité du sujet, la gestion des efforts à consentir.
Puis la reprise se fera très, très progressivement. Et il sera nécessaire de se faire accompagner par une personne compétente, dans ce domaine, les personnes formées à la Médecine des arts, notamment les kinésithérapeutes expérimentés pour les instrumentistes à vent, mais aussi les professeurs de musique, notamment ceux qui sont des instrumentistes à vent et qui enseignent cet instrument (et formés également à la Médecine des arts®).
Tout cela doit s’ajuster comme l’on règle une formule 1. Avancer prudemment et donc progressivement et surtout intelligemment, et sûrement, en utilisant les compétences de son chirurgien et celle d’un kinésithérapeute formé à la Médecine des arts®.

Rédacteur : Docteur ICARRE, Médecine des arts®
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