Beethoven, une relation de son oeuvre avec sa surdité

Surdité de Beethoven et oeuvre musicale

La surdité de Beethoven et son oeuvre musicale

Etudier les relations entre la surdité de Beethoven et son œuvre musicale demande d’analyser en détail les compositions de Beethoven dans les différentes périodes évolutives de sa surdité. Les auteurs de cette étude, Edoardo Saccenti et ses collègues, ont analysé ses œuvres.

La composition des seize quatuors à cordes s’est étalée sur une période de 25 ans.

On distingue dans l’œuvre musicale de Beethoven concernant les quatuors à cordes généralement trois périodes : les compositions précoces, contemporaines et tardives et elles illustrent le style de sa musique. Edoardi Saccenti et al. [1] ont choisi de proposer 4 périodes pour les corréler aux différentes évolutions de la surdité de Beethoven en prenant en compte que Beethoven pouvait travailler à plusieurs compositions en même temps.

Les périodes de création coïncident avec les états de sa condition auditive :

  • quatuors précoces : opus 18, composés entre 1798-1800, au début de la gêne auditive.
  • Puis les deux groupes suivants qui correspondent à l’aggravation progressive de l’audition de Beethoven et à la composition des quatuors contemporains
    • De 1805-1806, opus 59
    • De 1810-1811, opus 74 et 95,
  • Enfin les quatuors tardifs composés entre 1824 et 1826, il s’agit des opus 127 à 135.

Pour chacune de ces compositions, les chercheurs ont analysé la répartition des notes dans le premier mouvement du premier violon (en prenant comme repère un sol 5, fréquence de 1568 Hertz). Ils ont comptabilisé le nombre de notes élevées dans chacun des quatuors au cours des quatre périodes considérées, en tenant compte du nombre total de notes, du pourcentage de notes élevées et de la durée des passages.

Le pourcentage de notes aiguës, 8 % dans les premiers quatuors, a chuté à moins de 2 % en 1810, avant de remonter légèrement (4 %) dans ses ultimes créations.
L’analyse des auteurs montre l’existence d’une relation possible entre la progression de la surdité et la hauteur des notes utilisées. Beethoven aurait au cours de l’évolution de son hypoacousie privilégié les sons médiums et graves qu’il percevait mieux. Il s’agissait pour le compositeur d’utiliser les matériaux sonores qu’il pouvait encore entendre lors des représentations, mais aussi dans son travail de composition. Puis, une fois privé du feed-back auditif, y compris pour les sons de fréquences moyennes, alors que la surdité devient totale il va revenir à des sonorités plus aiguës. Ses compositions sont alors plus proche sur le plan de la hauteur sonore de sa première période stylistique. Dans le monde intérieur dans lequel il est enfermé, il ne se fie plus au feed-back auditif, mais à ses capacités cognitives et son expérience de compositeur.

Certes, il s’agit de la part de ces chercheurs d’hypothèses, car tout autant le type de sa surdité, son degré ainsi que ses causes ne sont toujours pas élucidés.

Composer sans entendre

Mais le questionnement le plus intéressant réside dans le fait qu’un de nos plus grands compositeurs a créé son œuvre majeure en l’absence d’audition.
Pour le Docteur Petruzzelli (ORL, vice-président du centre médical universitaire de Chicago), Beethoven avait probablement une forme de surdité progressive. Ses capacités auditives étaient très amoindries dès le mi-temps de sa vie, mais ses capacités créatives sont restées entières. Le message est clair pour Petruzzelli, nous ne devons pas nous limiter à ce qui peut être défini par nos aptitudes physiques pour nos aspirations, mais nous ajoutons également que nos limites physiques ne doivent pas non plus nous faire aspirer à faire précisément ce que nous ne pouvons pas faire. Beethoven a pu créer ses compositions, mais sa surdité lui a imposé d’arrêter ses activités de concertiste les plus lucratives à l’époque. Sa surdité a été compensée par sa connaissance des plus fines de l’art de la composition qui ne dépend pas à un certain niveau et à un certain degré d’expérience du feed-back auditif, mais des capacités psychiques et cognitives du musicien, même si l’audition reste une aide précieuse.


Rédacteur Docteur Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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Bibliographie

[1] Edoardo Saccenti et al. Beethoven’s deafness and his three styles. Décembre 2011 ; 343 : d7589. British Medical Journal


 

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