Anorexie mentale dans le milieu de la danse. Symptômes et diagnostic. Chapitre 2

Comment faire le diagnostic d’anorexie mentale [6]

Le fait que ces troubles du comportement alimentaire s’installent souvent insidieusement et fassent pendant longtemps l’objet d’un déni, plus ou moins partagé par l’entourage, contribue à retarder le moment du diagnostic et de la mise en place d’un accompagnement thérapeutique. C’est un des arguments majeurs pour appliquer une prévention et un dépistage précoce au sein des lieux de pratique de danse.
Les critères de diagnostic font l’objet de nombreuses discussions en raison de l’instabilité du diagnostic, de l’existence de formes subcliniques et de l’association avec d’autres troubles alimentaires.
Wilkins [7] défend de suspecter l’anorexie mentale dès que les trois A sont réunis,

A pour anorexie (conduite alimentaire restrictive)

La restriction alimentaire domine le tableau. Ses caractéristiques traduisent la nature psychologique de l’anorexie, la restriction étant généralement justifiée au début par un régime qui devient progressivement drastique. Parfois cette quasi intolérance à l’alimentation s’accompagne d’attitudes paradoxales, d’un intérêt nouveau pour la diététique, le calcul des calories, le grignotage de portions infimes, etc. Les repas pris en groupe ou en famille peuvent devenir l’occasion de conflits ou de tensions du fait de la restriction systématique alimentaire. La jeune fille cache ses troubles, avec en particulier les vomissements provoqués et répétés. Le milieu de la danse est dans ce domaine particulier dans la mesure où l’alimentation revêt une importance singulière ; une élève dans le champ de la danse doit correspondre à un profil physique plus ou moins standard où le poids entre en ligne de compte. L’attention accordée sur ce point existe souvent même au sein de la cellule familiale.

A pour amaigrissement

L’amaigrissement, insidieux surtout au début dans une ambiance collective où les indices corporels sont globalement bas, mais peut se révéler brutalement quand l’anorexie mentale proprement dite s’installe, avec des pertes pouvant atteindre 20 à 30 % du poids souhaitable. On peut parler de dénutrition quand l’indice de Masse Corporelle devient inférieur à 18,5 et de dénutrition importante en dessous de 14, il y a alors un risque vital.

A pour aménorrhée

L’arrêt des règles est un signe constant, qui peut être primitif (jeune fille non réglée) ou secondaire (après 3 mois de règles régulières). Dans 55 % des cas, elle coïncide avec le début de l’anorexie. Elle précède l’anorexie dans 15 % des cas. Elle peut être masquée par la prise de la pilule.

Si le BMI (index de marque corporelle de Quételet). Poids (kg)/taille (m2) est inférieur à 17 chez la femme et à 19 chez l’homme, une prise en charge médicale sérieuse est nécessaire.

A cela nous ajoutons le A ( de Artistica)

Anorexie Artistica©, c’est une des dimensions que Médecine des arts désire apporter au concept global des anorexies. Les pratiques singulières comme peuvent l’être la danse, mais également d’autres pratiques que l’on retrouve dans le champ du spectacle vivant, mais aussi au cinéma peuvent amener l’artiste à s’engager dans une démarche de privation alimentaire. Il nous paraît plus réaliste d’ajouter ce concept en le distinguant de l’anorexie mentale décrite dans un champ général. Dans le même temps, cette démarche ne doit pas exonérer d’une stratégie de prévention dans ce champ artistique afin de distinguer cette dimension d’une anorexie mentale proprement dite. Ceci est d’autant plus vrai que cette distinction va demander un sens clinique plus aiguisé, un suivi plus précis, une stratégie de prise en charge parfois particulière. En effet la dimension artistique, comme dans le champ sportif pour les athlète de haut niveau doit être prise en compte et doit permettre de recontextualiser la problématique alimentaire.

Ce thème, l’Anorexie Artistica©, sera abordé secondairement dans les formes cliniques de l’Anorexie mentale. Il permettra de mettre l’accent sur les caractéristiques du milieu artistique et son rapport au corps et à la performance artistique.

La surveillance médicale précoce dans le milieu de la danse doit permettre de dépister précocement, au-delà de l’anorexie mentale caractérisée, les troubles du comportements alimentaires mineurs, ce d’autant que le profil et la morphologie de la danseuse classique en particulier risque soit de majorer le problème ou de le minorer en banalisant la maigreur. Mais la distinction entre le trouble avéré chez une personne qui de fait peut être maigre, avoir par période des conduites alimentaires restrictives et être aménorrhéique et des conduites alimentaires désordonnées peut être délicate. Cela va demander un grande connaissance de la part du corps médical et paramédical du milieu de la danse, des danseurs, ainsi que des exigences de leurs pratiques.

Imprimer

La boutique

Revues

Revue Médecine des Arts N°88 Danseurs Musiciens
Revue Médecine des arts N°88 Danseurs Musiciens
17,00 € Accéder à la boutique

S'abonner à la Revue Médecine des arts

Santé du danseur


Association

Faire un don
Adhérer