Aïda

Prélude et premier acte

Une petite symphonie fuguée et exécutée pianissimo sert de prélude. Le travail harmonique en est aussi remarquable que l’effet d’expression en est bien rendu. Cette forme scolastique se retrouve encore dans la scène d’introduction, entre Ramfis et Radamès. La romanza de Radamès : Céleste Aïda, est fort gracieuse. Les accords plaqués à l’aigu qui l’accompagnent produisent un joli effet. Je ne sais pourquoi le compositeur a compris, d’une façon si mélancolique et si morbide les rêves d’ambition, de gloire et d’amour fortuné du jeune capitaine. Comment ? Radamès voit déjà son amante Aïda couronnée reine par la valeur de son bras :

Il tuo bel cielo vorrei ridarli,
Le dolci brezze del patrio suol,
Un regal serto sul crin posarti,
Ergerti un trono vicino al sol,

Et il termine sa romance dans un langoureux pianissimo.

Dans la Favorite, il y a une situation analogue. L’air : Oui, ta voix m’inspire, rend avec plus de vérité les sentiments qui animent Fernand. Le chant de guerre : Su ! del Nilo al sacro lido, est d’une facture grandiose et d’une sonorité puissante. Aïda exprime les angoisses que lui cause cette guerre, qui peut être aussi fatale à son père qu’à son amant, et les notes syncopées qu’elle fait entendre sur le motif syncopées qu’elle fait entendre sur le motif chanté par Radamès : Per chi piango ? Per chi prego ? Qual poter m’avince a lui ! forment un des beaux passages de l’opéra. La douleur et l’ardeur guerrière s’y unissent sans se confondre. Cette page seule suffirait à révéler un compositeur dramatique de premier ordre, si M. Verdi ne nous avait pas habitués à des effets semblables dans beaucoup d’autres ouvrages. La scène de désespoir d’Aïda lui fournit l’occasion d’écrire un air très pathétique. C’est un morceau capital dont le texte a été magistralement interprété par le musicien. Je ne puis m’empêcher de le citer en entier. On sera heureux de constater qu’il y a encore des poètes lyriques dans ce monde.

Ritorna vincitor ! E dal moi labbro
Usci l’empia parola ! Vincitore
Del padre mio… di lui che impugna l’armi
Per me… per ridonar mi
Una patria, una reggia ! E il nome illustre
Che qui celar mi a forza – Vincitore
De mici fratelli… ond’io lo vegga, tinto
Del sangue amato, trionfar nel plauso
Dell’ Egizie coorti! E dietro il carro,
Un Re… mio padre… di catene avvinto!
L’insana parola
O Numi sperdete !
Al seno d’un padre
La figlia rendete ;
Struggete le squadre
Dei nostri oppressor !
Sventurata ! che dissi ? E l’amor moi ?
Dunque scordar poss’io
Questo fervido amor che, oppressa e schiava,
Come raggio di sol qui mi beava?
Imprechero la morte
A Radames… a lui che amo pur tanto !
Ah ! non fu in terra mal
Da più crudeli angoscie un core affranto.
I sacri nomi di padre… di amante
Ne profferir poss’io, ne ricordar…
Per l’un… per l’altro… confusa, tremante…
Io piangere vorrei… Vorrei pregar.
Ma la mia prece in bestemmia si muta…
Detillo e il pianto a me… colpa il sospir…
In notte cupa la mente è perduta…
E nell’ansia crudel vorrei morir.
Numi, pietà – del moi dolor…
Amor fatal – tremendo amor
Spezzami il cor – sammi morir !

Toute la musique écrite pour la deuxième tableau de cet acte a un caractère incontestable d’originalité. M. Verdi a fait usage des tonalités anciennes et introduit plusieurs progressions particulières aux modes du chant grégorien. On a prétendu qu’il avait reproduit, dans les motifs des danses sacrées, des mélodies indigènes. Cela est possible. Plusieurs de ces chants africains, transmis par la tradition, remontent à une haute antiquité et par conséquent ont beaucoup d’analogie avec plusieurs de nos plains-chants. Mais le compositeur les a accompagnés d’une harmonie excellente et souvent d’un contrepoint très habile, de telle sorte qu’ils n’offensent pas l’oreille et ne forment pas une disparate dans l’œuvre artistique. Toute cette scène dans le temple de Vulcain à Memphis est extrêmement belle.

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